Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 18.djvu/557

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
Mme DE STAËL ET M. NECKER
D’APRÈS LEUR CORRESPONDANCE INÉDITE


MADAME DE STAËL À METZ

Nous avons laissé Mme de Staël éplorée, s’arrachant de Paris pour obéir à un ordre arbitraire, s’attardant aux portes et prenant enfin, après de longues hésitations, la route de l’Allemagne. Ce n’était pas une résolution brusque qui la déterminait à adopter cette route plutôt que celle qui l’aurait ramenée à Coppet. Elle ne faisait au contraire que mettre à exécution un dessein conçu depuis longtemps, tantôt abandonné, tantôt repris, suivant les circonstances qu’elle traversait. Avant de l’accompagner, d’étape en étape, au cours de ce voyage qui devait durer depuis octobre 1803 jusqu’en avril 1804, et de reprendre la publication des lettres adressées par elle à son père, de Metz, de Weimar, de Berlin, en les entremêlant de quelques fragmens des réponses de M. Necker, je voudrais remonter de quelques années en arrière et montrer comment, après avoir témoigné peu de goût, et même quelque dédain pour la littérature allemande, Mme de Staël en était arrivée peu à peu à reconnaître qu’il y avait, de l’autre côté du Rhin, une province intellectuelle de l’Europe qui valait la peine d’être explorée, et pourquoi elle avait résolu d’entreprendre elle-même cette exploration.

  1. Voyez la Revue des 15 février, 1er et 15 mars et 1er avril.