Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 18.djvu/499

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

craintes exprimées par votre lettre sont à la fois excessives et injustifiées.

« Agréez, monsieur le député et cher collègue, l’assurance de ma haute considération.

« BRIAND. »


Quand M. Briand plaidera devant le jury de la Seine pour quelque Jack l’éventreur, s’il vient à dire qu’à toutes les époques il y a eu des femmes qui sont mortes, cet argument ne lui fera pas gagner son procès. Pour nous prouver combien nous avons tort de nous inquiéter des églises que l’on jette bas de toutes parts et que je suis prêt à lui énumérer, il me dit qu’à toutes les époques, et même sous le régime concordataire, il y a eu des désaffectations d’églises, des églises qui arrivaient au terme de leur carrière. C’est entendu. Mais je lui parle des églises qui ne demandaient qu’à vivre et où des êtres ineptes, avec des éclats de joie, portent la pioche et la dynamite.

Qu’il ne fasse pas l’homme qui ne veut pas comprendre. Il sait, et chacun peut prévoir, que la loi de séparation couvrira bientôt la France de ruines,.. Ici, je l’entends qui m’interrompt pour me crier : « A qui la faute ? » Monsieur le ministre, parlons utilement. Ne vous égarez pas en récriminations. Je ne cherche pas les responsabilités historiques. Je vous signale une série de faits. Tenons-nous-en à ce qui fait l’objet de ma lettre. Je vous ai dit et je vous répète : « Vous êtes au pouvoir pour sauvegarder tous les intérêts français. Les églises sont au premier rang de nos richesses de civilisation. Que va-t-il advenir d’elles ? Quelles sont les vues du gouvernement ? Dévoilez-nous votre pensée et votre plan. »

Vous semblez, monsieur le ministre, désavouer ces guets-apens. Vous me savez gré d’admettre que vous n’acceptez pas avec indifférence ces débuts d’une ère de vandalisme. Soit, je veux supposer que cette guerre aux églises ne vous séduit pas. Je me rappelle que vous avez protesté contre l’annulation, par un préfet, d’un crédit destiné aux réparations d’une église ; vous avez déclaré, à cette occasion, que « rien ne s’oppose à ce que les communes réparent à leurs frais les églises dont elles sont propriétaires ou contribuent à les réparer. » Mais cet incident, où vous avez fait preuve d’esprit de gouvernement, montre