Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 18.djvu/476

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

justice qu’il n’est pas entré dans la voie néfaste où les socialistes le poussaient par les épaules. Des 800 millions de déficit, M. Dumont, ministre des Finances, ne propose d’en demander qu’une partie, — 300 millions, — à l’impôt et, au lieu d’imaginer des taxes nouvelles, incertaines, aventureuses, il se contente d’augmenter quelques-unes de celles auxquelles nous sommes habitués, qui ont fait leurs preuves et dont on sait approximativement ce qu’elles peuvent encore donner. Les protestations s’élèvent déjà contre ces augmentations ; il fallait s’y attendre ; le contribuable est surchargé ; s’il se plaint, s’il crie au moment où on aggrave encore le poids qui l’écrase, rien de sa part n’est plus naturel, ni même, si on veut, plus légitime. Mais, nous le répétons, il faut payer. On aurait dû protester contre les dépenses avant qu’elles fussent faites ; il est trop tard à présent, et tout ce que nous pouvons demander au gouvernement est de ne pas compliquer une situation difficile par des inventions insuffisamment étudiées et dont personne ne voudra si on les étudie suffisamment. Les impôts actuels, directs ou indirects, présentent une base plus solide ; c’est à eux que M. Dumont demande les 300 millions dont il a besoin. 100 millions d’excédens se trouvent heureusement disponibles sur un budget antérieur. Le reste, c’est-à-dire environ 400 millions, sera demandé à l’emprunt. Si on ajoute à cette somme un milliard indispensable à notre outillage militaire, c’est un emprunt de 1 400 millions que nous sommes dans l’obligation de faire. Nous voilà loin de la formule triomphante qu’on mettait en avant, il y a quelques années à peine : ni emprunt, ni impôts nouveaux ! Aujourd’hui on emprunte et on augmente les impôts anciens. Si la nécessité n’en était pas si évidente et si urgente, ce n’est pas à la veille des élections que le gouvernement et la Chambre s’inclineraient devant elle, mais nul ne peut contester la nécessité, ni l’obligation qui en résulte. M. le ministre des Finances fait appel au « courage fiscal » de la Chambre et du pays pour faire face à l’une et à l’autre. Malheureusement, le courage fiscal ne suffit pas à tout.

On voit ce que va être la session de la Chambre ; il y en a eu rarement d’aussi lourdement chargée. Avons-nous besoin de dire que la gravité des circonstances n’atténue pas les compétitions de personnes ni les intrigues auxquelles elles donnent lieu ? Les radicaux et les radicaux-socialistes poursuivent le travail d’union et de fusion dont ils ont posé le principe au congrès de Pau ; ils s’appliquent à rédiger le « programme minimum » qu’il faudra signer sous peine de n’être plus républicain aux yeux de ces messieurs. Après cela, et même avant si