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au jeune païen, son époux : « Est secretum, Valeriane, quod tibi volo dicere... Il existe un secret, Valérien, que je veux te dire. Un ange du Seigneur m’aime et, avec un soin jaloux, il garde mon corps. » Peu de mots, et peu de notes, mais choisies, mais expressives. L’antienne est à quatre voix : alto, ténor et deux basses. La trame en est légère et le fil en est court. Mais justement le charme de cette petite pièce est fait, ainsi qu’il convient, de discrétion et de brièveté. « Est secretum... » Dès le début et jusqu’à la fin, c’est bien ici la musique d’un secret, et les harmonies, et la mélodie elle-même, semblent jeter sur la virginale confidence un voile de mystère et de pudeur.

L’œuvre que le musicien d’Italie devait nous apporter n’est pas sienne, ou du moins elle ne l’est que par l’admiration et l’amour qu’il lui a voué, par le soin qu’il a déjà pris, en leur pays commun, de la produire et de la glorifier[1]. Religieuse, mystique même, connue, si ce n’est célèbre, de nom, mais de nom seulement, cette œuvre s’appelle la Rappresentazione di Anima e di Corpo. Elle date de l’an 1600 et son auteur est Emilio dei Cavalieri, gentilhomme romain. Intendant de la musique du grand-duc de Toscane pendant plusieurs années, (jusqu’en 1596), Cavalieri prit part, avec les Péri, les Caccini et autres, à la création du nouveau style musical, dit représentatif, et de l’opéra florentin. Péri, dans la préface de son Euridice, assure même que, « le premier de tous et par une merveilleuse invention, » Cavalieri fit entendre sur la scène ce genre de musique[2].

De retour à Rome, Cavalieri fit « représenter » Anima e Corpo, en février 1600 à l’ « oratoire » de la Vallicella. L’assistance était fort nombreuse, et le succès fut retentissant. La préface de la première édition nous avertit que l’objet de cette représentation était d’émouvoir de plus d’une manière, d’éveiller divers sentimens, la piété ou la joie, de provoquer les pleurs, ou le rire, enfin les différens états de l’esprit ou de l’âme. Suivent certaines indications touchant la place des acteurs sur la scène, leurs mouvemens, leurs costumes, et même le ballet, par lequel on peut ou non terminer le spectacle. Si religieuse qu’elle soit, et bien qu’elle ait été d’abord exécutée dans l’oratoire destiné par saint Philippe de Neri à des concerts de musique sacrée, ce serait

  1. Deux auditions en ont été données à Rome, sous la direction de M. Tebaldini : l’une à l’Académie de Sainte-Cécile et l’autre à l’Augusteum, les 12 et 16 avril 1912.
  2. Pour tout ce qui regarde Emilio dei Cavalieri et les origines de la Rappresentazione, voyez : 1° M. Romain Rolland : Histoire de l’Opéra en Europe avant Lully et Scarlatti ; Paris, Thorin, 1895. — Musiciens d’Autrefois ; Hachette, Paris 1908 ; 2° Saggio storico sul Teatro musicale italiano, par M. Arnaldo Bonaventura ; Giusti, Livorno, 1913.