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nouvelle, et telle que Joubert ne devait pas l’aimer. Ainsi, l’on changea la formule du serment. Joubert, le 7 octobre, jura d’ « être fidèle à la Nation et de maintenir de tout son pouvoir la liberté et l’égalité ou de mourir à son poste. » Il jura ; et il signa.

S’il jura, c’est que ses fonctions touchaient à leur fin et qu’il n’avait pas du tout l’intention de solliciter le renouvellement de son mandat. Comment, tel que nous le connaissons, fût-il resté ? Le 22 septembre, le procureur syndic convoquait ainsi les électeurs : « Lorsque, de toutes parts, les despotes réunissent les forces de leurs esclaves pour nous égorger ou nous asservir, que des Français assez lâches pour le désirer mettent tout en œuvre dans l’intérieur pour seconder les projets de nos ennemis, vous ne devez laisser en place que des citoyens qui soient sincèrement passionnés pour l’Egalité et la Liberté et résignés à tout souffrir, tout sacrifier pour les défendre... Dans le cas où vous jugeriez à propos d’investir de votre confiance quelqu’un qui ne l’aurait pas été déjà, je vous invite à écarter soigneusement tous ceux en qui vous connaitrez de la répugnance à faire valoir les mesures que l’Assemblée nationale et le pouvoir exécutif croiront devoir leur prescrire. Pour que la nouvelle révolution puisse nous conduire à des résultats avantageux, il faut que tous ceux que vous destinez à la servir ayent une trempe d’âme assez forte pour s’élever à la hauteur de la journée du dix, et assez d’onction pour faire germer dans l’âme de leurs concitoyens les grands principes sur lesquels reposent le bonheur et la prospérité de la Nation. Je suis, avec fraternité, le Procureur syndic[1]. » Nous voilà fort loin de la douce magistrature qu’avait imaginée l’Assemblée constituante et à l’aménité de laquelle Joubert avait été sensible. Sous cette forme nouvelle, elle n’a plus de quoi séduire cet homme intelligent et sage.

L’élection des nouveaux juges de paix, dans le district de Montignac, fut fixée au 28 octobre. Joubert ne se présenta certainement pas. Et Borredon, je n’en sais rien. Mérilhou fut élu. Il fut installé le 3 novembre. Et Desmons, procureur de la commune, lui adressa ce discours : « Citoyen, le peuple l’a nommé juge de paix. Ce titre t’impose de grands devoirs, de

  1. Archives de la Dordogne, L. 570.