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M. GABRIEL D’ANNUNZIO
ET
LA CRITIQUE ITALIENNE

« Nul n’est prophète en son pays. » Plus que tout homme au monde, M. Gabriel d’Annunzio en pourrait témoigner.

Après avoir salué avec sympathie les débuts de cet écrivain, la critique italienne s’est montrée à son égard d’une sévérité croissante. Et le public italien lui-même n’est pas éloigné de penser comme la critique sur le premier littérateur de l’Italie contemporaine. A cinquante ans révolus, M. d’Annunzio ne jouit pas encore dans sa patrie, — ou n’y jouit plus, — d’une situation de tout repos. Les « premières » de ses drames restent tumultueuses. On applaudit à tout rompre... et l’on siffle à tout casser. Partisans et adversaires marquent la même conviction... ou le même parti pris. Et ce qui se passe pour les pièces de M. d’Annunzio se produit aussi pour ses romans, pour ses poèmes. Il a des défenseurs et des détracteurs pareillement acharnés.

Hors d’Italie, cet écrivain continue de trouver des lecteurs et des critiques mieux disposés. S’il est vrai que les verdicts de l’étranger font prévoir ceux de la postérité, M. d’Annunzio peut dormir tranquille. Une gloire posthume fort appréciable lui est réservée. En attendant, ses juges naturels, ses compatriotes, portent sur son œuvre des appréciations de moins en moins flatteuses. Depuis Più che l’amore (1906), cette pièce qui tomba si bruyamment, on peut même dire que la chute du