reçu du Roi le grand Trianon de Louis XIV, et s’en servait pour loger son père, le roi Stanislas, pendant les séjours qu’il faisait auprès d’elle. Un peu plus tard, Mme de Pompadour engageait Louis XV à établir dans le voisinage une de ces « ménageries » rustiques alors à la mode et à réunir une série de plantes rares, qui prit bientôt un grand développement. On construisit un pavillon, un salon de verdure dans un jardin à la française, et enfin le petit château, qu’inaugura Mme du Barry. Il s’élevait au milieu de vastes serres et d’importantes plantations botaniques regardées comme des modèles, et que dirigeaient avec autorité les savans jardiniers Claude et Antoine Richard, collaborateurs du grand Jussieu.
C’est tout cet ensemble que Louis XVI mit à la disposition de la Reine : « Vous aimez les fleurs, aurait-il dit ; j’ai un bouquet à vous offrir, le Petit-Trianon. » On lui prête un autre propos, sans vraisemblance : « Ces beaux lieux ont toujours été le séjour des favorites du Roi ; ils doivent donc être le vôtre. » Au reste, cette fantaisie des souverains ne surprend personne et, le 7 juin 1774, l’ambassadeur de l’Empire, Mercy-Argenteau, l’apprend à l’Impératrice de la façon la plus naturelle : « Depuis longtemps et lorsque Madame l’Archiduchesse était encore dauphine, elle désirait beaucoup d’avoir une maison de campagne à elle en propre, et elle s’était formé plusieurs petits projets à cet égard ; à la mort du Roi, le comte et la comtesse de Noailles suggérèrent le Petit-Trianon. » Le comte de Noailles, plus tard maréchal de Mouchy, mari de la dame d’honneur de la Reine, était gouverneur de Versailles et, à ce titre, avait qualité pour exprimer un avis ; il s’offrait à y joindre une démarche auprès du Roi. Mercy trouva qu’une intervention officieuse ne convenait pas à la dignité de la Reine, et son conseil fut « de faire elle-même cette demande sans le concours de personne. Sa Majesté daigna agréer mon idée et, au premier mot qu’elle prononça au Roi du Petit-Trianon, il répondit avec empressement que cette maison de plaisance était à la Reine et qu’il était charmé de lui en faire don. Cette maison est à un quart de lieue du château de Versailles ; elle est agréablement bâtie, fort ornée, avec de jolis jardins et un jardin séparément destiné à la culture des plantes et arbustes étrangers. »
La bonne grâce du Roi, son gendre, enchante l’impératrice Marie-Thérèse ; ce présent compte à ses yeux comme un heureux