avec raison qu’en politique, ce qui est inutile peut devenir nuisible. Il suffit que l’Espagne et la France, se manifestent mutuellement une confiance permanente, quotidienne, pour que leur rapprochement devienne fécond à un double titre, d’abord parce qu’il empêchera des malentendus de se renouveler, ensuite parce qu’il établira une habitude d’entente et d’accord, qui sera notre meilleure garantie. Enfin on a parlé d’un traité de commerce. Ce n’est évidemment pas dans un voyage aussi rapide que celui de M. Poincaré qu’on peut même en jeter les bases : on a pu le faire avant, on pourra le faire après, dans des négociations qui sont toujours lentes et laborieuses. Mais, certes, un arrangement de ce genre est infiniment désirable. La situation commerciale actuelle est médiocre et mauvaise entre les deux pays, elle se ressent de la politique d’autrefois, elle porte le cachet d’une autre époque ; il y a tout intérêt à la modifier et nous espérons qu’on le fera dans un délai aussi rapproché que possible. Le délai, toutefois, est inévitable, les œuvres de ce genre ne pouvant jamais être le résultat d’une improvisation.
Ce qui restera du voyage de M. Poincaré en Espagne, c’est l’élan spontané de sympathie qui s’est produit entre les deux peuples et leurs gouvernemens. M. Poincaré a eu sans doute raison lorsqu’il a dit dans son toast, dont la forme a été comme toujours très heureuse : « La clairvoyance de l’opinion publique a rendu facile la tâche des gouvernemens. » L’opinion n’a pas été toujours clairvoyante, mais il y a en elle une sorte d’instinct qui, au bout de quelque temps, la ramène à une impression plus juste et à un sentiment plus sûr. Il suffit d’attendre le moment où les choses sont en quelque sorte dans l’air, pour les aider à se dégager et à se préciser par des manifestations opportunes. Les voyages des chefs d’État ont souvent servi à cela. Rien n’est changé entre l’Espagne et la France, mais les deux pays ont pris mieux conscience de leurs intérêts communs et de leurs sentimens réciproques : il en est résulté pour eux une ambiance plus favorable où ils se meuvent plus à l’aise et qui rendra leurs rapports plus faciles. Et cela, assurément, est un résultat très heureux.
Nous voudrions bien n’avoir pas à parler des Balkans dans chacune de nos chroniques ; mais les Balkans ne nous le permettent pas ; ils sont toujours en fermentation et, quand le grand travail se termine, ou paraît se terminer sur un point, il recommence sur un autre. Les physiciens disent qu’il y a toujours la même quantité de mouvement dans le monde : de même dans les Balkans ; il y a toujours en eux la