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les plus grandes. Si on laisse tomber brusquement dans l’eau un tube ou un ballon de quartz chauffé au rouge, il ne se brise pas. Cela tient à ce que le coefficient de dilatation du quartz est xm des plus faibles qui soient, 17 fois plus faible que celui de l’acier, 12 fois plus faible que celui du verre, et égal à celui du métal invar de M. Ch. Ed. Guillaume. Sans insister sur tous les services que cette industrie naissante est destinée à rendre, grâce au prix de plus en plus modique de la quartzerie, comment ne pas admirer une fois de plus l’enchaînement heureux des choses, qui, d’une petite recherche spéculative sur des rayons que personne n’a jamais vus, fait jaillir soudain des usines, de la richesse, de l’utilité ?

Grâce aux appareils en quartz et en utilisant des sources riches en courtes longueurs d’onde, comme l’arc électrique entre métaux, les tubes luminescens à gaz raréfiés et surtout la lampe en quartz à vapeur de mercure, on est arrivé à prolonger l’ultra-violet jusque vers 0,200 μ. À cet endroit, le quartz lui-même devient opaque, mais l’ingéniosité des physiciens redouble avec les obstacles. Le physicien allemand Schumann découvre que le spath-fluor ou fluorine, cette substance cristalline bien connue des minéralogistes, est encore transparent dans cette région spectrale. À l’aide d’appareil de fluorine il prolonge le spectre connu jusque vers 0,123 μ. Puis il découvre que là l’air lui-même, même sous quelques milUmètres d’épaisseur, est opaque. Il opère alors dans le vide, tandis que Lyman opère dans une atmosphère d’hydrogène ; ils suppriment de leurs plaques photographiques la gélatine qui, elle aussi, est opaque aux radiations tant cherchées. Et c’est ainsi que ces deux physiciens parviennent enfin à photographier les plus courtes longueurs d’onde aujourd’hui connues, qui sont voisines de 0,103 μ[1].

Devant cette sorte de fureur qui pousse les savans à vouloir déceler malgré tous les obstacles, au prix d’efTorts épuisans, quelques petites radiations insoupçonnables ; devant cette âpre guerre livrée à la matière pour pouvoir ajouter à un chiffre quelques décimales de plus, certains hausseront les épaules. Ceux surtout pour qui, en toute chose, il faut considérer la fin. Ces derniers pourtant auront tort, — car, comme nous allons voir, les applications de toute sorte des rayons ultra-violets se pressent dès maintenant en foule à l’horizon de la science. Elles ont de quoi satisfaire même les esprits les plus utihtaires, même ceux

  1. On a annoncé tout récemment que l’on avait prolongé le spectre jusqu’à 0,90 μ au moyen de l’étincelle électrique condensée éclatant entre électrodes d’aluminium. Cette nouvelle demande confirmation.