Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 17.djvu/630

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ils iront chez son correspondant de Cette, qui les fera parvenir à Nice par voie de mer.


III

Les chemins du moyen âge se faisaient tout seuls, par un passage répété des voyageurs au même endroit ; mais, par ce passage aussi, ils se détérioraient : les ornières devenaient peu à peu des fossés et des fondrières aux points surtout où, pour une cause quelconque, cavaliers et rouliers ne pouvaient emprunter sans façon les champs contigus à la piste ordinaire.

L’idée d’entretenir cette piste était donc venue de bonne heure. Au profit des seigneurs qui en étaient chargés avaient été établies des taxes, — péages, barrages et « travers, » — qui se percevaient exactement, sans que toutefois, comme le constatent les ordonnances, les bénéficiaires fissent exécuter aucun travail. Procéder à leur place à ces réparations en « saisissant les deniers, » le pauvre Etat des XVe et XVIe siècles n’en avait pas la force. Il prescrit aux sénéchaux et autres juges « de savoir sur les lieux à qui incombe le curage des rivières et l’entretien des chemins ; et, s’il se trouve que personne n’en est chargé, d’aviser pour le faire la voie la plus légère et moins grévable pour les habitans (1413). » Cent soixante ans plus tard, à la suite des Etats de Blois, l’ordonnance de 1579 contenait des plaintes semblables et des remèdes pareillement illusoires.

Comme il fallait tout de même un minimum de viabilité, il se faisait un minimum de réparations. Les paroisses riveraines et les pouvoirs locaux payaient l’extraction de quelques pierres et les vacations de quelque huissier, mandé « pour accoutrer les chemins trop dangereux tant pour gens que pour bêtes. » Sous les derniers Valois, les bonnes villes avaient obtenu du Roi l’ « octroi, » — le mot est resté, — c’est-à-dire la grâce... de s’imposer chaque année pour cet objet ; et, parmi les dépenses des communes rurales, figurent périodiquement quelques francs pour des « commissaires-visiteurs » des chemins. Mais cela ne saurait aller bien loin, à moins qu’un gouverneur redoutable, comme Lesdiguières en Dauphiné, ne menace les consuls, s’ils ne font d’urgence au chemin royal de Marseille les réparations indiquées, « de leur envoyer un de ses gardes avec ordre de