Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 17.djvu/408

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tons que notre infériorité ne se borne pas aux dirigeables ; qu’en ce qui concerne les aéroplanes, l’Allemagne, l’Angleterre l’emportent, ou vont incessamment l’emporter sur nous. Je ne crois pas beaucoup à ces affirmations pessimistes.

Ce qui, à mon avis, doit nous rassurer, c’est l’admirable fonctionnement de nos escadrilles d’avions. Au mois de septembre 1912, ce fut une véritable révélation que de voir le service intensif accompli par nos aviateurs, sans accident, et même sans incident. En se bornant aux manœuvres du Poitou, on a rais en ligne plus de 60 appareils, dont les vols, mis bout à bout, représentent plus de deux fois le tour de la terre ; c’est déjà quelque chose. Mais ce qui est plus frappant encore, c’est la réunion de nos aéronefs en escadrilles bien compactes, bien homogènes, qui forment de véritables unités militaires, aussi maniables que celles de nos vieilles armes, bataillons d’infanterie, escadrons de cavalerie, ou batteries d’artillerie.

À cette époque, aucune Puissance au monde n’était capable de présenter une organisation pareille. J’ignore quel progrès ont été depuis réalisés à l’étranger dans cette voie, mais tant que je n’aurai pas constaté qu’en Allemagne ou ailleurs, on a mis en œuvre une masse aussi imposante et aussi homogène d’avions, je resterai persuadé que notre supériorité en aviation militaire est considérable, et au-dessus de toute discussion.

Certes, nous ne pouvons pas prétendre posséder indéfiniment le monopole des escadrilles aériennes, et il ne faut pas nous endormir sur nos lauriers ; mais l’avance que nous possédions il y a un an sur nos rivaux ne me paraît pas difficile à garder. Je sais quels efforts on fait pour la maintenir, et j’ai confiance dans l’avenir de nos destinées aéronautiques.

Je voudrais faire partager cette confiance à mes lecteurs. Notre infériorité en dirigeables ne doit être que momentanée, et elle est, d’ailleurs, à mon avis, largement compensée par notre supériorité en aéroplanes.

Pour le présent, notre mot d’ordre doit être de travailler avec énergie et persévérance, et d’avoir confiance, malgré tout ce qu’on a pu dire, en notre flotte aérienne militaire.

Lieutenant-colonel Paul Renard.