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l’Afrique, toute l’Amérique du Nord et les trois quarts de l’Amérique du Sud. Ce sont les terres de l’hémisphère continental. L’hémisphère océanique comprend l’Australie et l’Océanie, l’archipel malais et de petites parties de l’Amérique du Sud et de l’Asie orientale, enfin l’Antarctide.

La subdivision de la Terre en deux hémisphères océanique et continental eût d’ailleurs été extrêmement différente lors des époques géologiques anciennes. Alors, des régions aujourd’hui très montagneuses étaient plongées au fond des océans, n’en déplaise à Voltaire qui a dépensé des trésors d’ingéniosité et de raisonnemens aussi faux que spirituels pour nier que les fossiles prouvassent quelque chose à cet égard. Admettre une chose pareille n’était-ce pas en effet donner un semblant de vraisemblance à l’histoire du Déluge, n’était-ce pas admettre qu’il put y avoir une seule chose exacte dans la Bible ? Pourtant c’est Voltaire qui avait tort. En ces époques lointaines, si des terres étaient noyées qui émergent aujourd’hui fièrement vers le ciel, en revanche, des continens entiers existaient qui se sont depuis lors abîmés au fond des mers, et parmi eux la mystérieuse Atlantide, dont M. Pierre Termier, de l’Académie des sciences, vient de nous démontrer l’existence passée avec des argumens nouveaux empruntés à la géologie et qui forcent la conviction. Nous allons les passer rapidement en revue.

La légende était très répandue dans l’antiquité chez tous les peuples méditerranéens d’une île immense et fortunée, douée d’un climat délicieux et qu’un cataclysme soudain engloutit un jour dans les flots. Dans le Timée de Platon, comme dans son Critias, cette sombre aventure est racontée en termes qui sont plutôt ceux de l’histoire que de la légende. Écoutons parler Platon, ou plutôt le vieux prêtre égyptien qu’il fait converser avec Solon : « Les livres nous apprennent la destruction par Athènes d’une armée singulièrement puissante, armée venue de la mer Atlantique et qui envahissait insolemment l’Europe et l’Asie ; car cette mer était alors praticable aux vaisseaux et il y avait au delà des Colonnes d’Hercule une île plus grande que la Lybie et que l’Asie[1]. De cette île on pouvait facilement passer à d’autres îles et de celles-là à tout le continent qui entoure la mer intérieure... Plus tard de grands tremblemens de terre et des inondations engloutirent en un seul jour tout ce qu’il y avait là de guerriers. L’île Atlantide disparut sous la mer... »

  1. Les anciens ne connaissaient qu’une minime partie de l’Asie.