Ce sont de véritables forteresses ambulantes : elles grimpent les côtes, dévalent par les pentes, braquent, où cela leur fait plaisir, des canons, des mitrailleuses, jusqu’au moment où, l’exercice terminé, toute une compagnie sort des flancs de cette voiture gigogne. C’est très curieux. Ailleurs on assiste au renflouement du Maine, ce bateau dont l’explosion provoqua jadis la guerre entre l’Amérique et l’Espagne. Ainsi, l’histoire, l’histoire naturelle, la géographie, l’ichthyologie, la métallurgie, toutes les sciences en un mot, nous sont présentées, non dans leur suite et leur enchaînement méthodique, cela va sans dire, mais par morceaux et par bribes. Cela ne remplace pas les leçons de la Sorbonne et les expériences des laboratoires, mais tout de même est très supérieur à la physique amusante dont se contentait la naïveté de nos pères. Cela est fragmentaire, et sans beaucoup de lien, et même assez incohérent. Mais il faut remarquer, une fois pour toutes, que l’incohérence est essentielle aux spectacles cinématographiques. L’enseignement par le cinématographe est encyclopédique et incohérent, et c’est par là qu’il est éminemment moderne.
Une autre partie comprend les « actualités. » Nous avions déjà la presse illustrée par la photographie ; mais combien préférables aux photographies immobiles des magazines et des journaux ces photographies qui remuent ! Tout ce qui, dans la semaine, a mérité de fixer l’attention publique, défile sur l’écran. La première place, comme il est juste, est donnée aux choses de sport. Les circuits et les tours de France se courent devant nous à leur vertigineuse allure. Automobiles, bicyclettes, motocyclettes et autres machines à dévorer l’espace, se livrent à toutes leurs folies et à tous leurs excès de vitesse. On les voit prendre leurs virages, se lancer comme des bolides. La poussière qu’elles soulèvent demeure quelque temps suspendue comme un nuage : on la respire. Puis l’aviateur qui vient de se tuer. Puis les souverains et personnalités étrangères et parisiennes. J’ai eu ainsi le plaisir de voir M. Cochon dont on a tant parlé à propos des assiégés du fort Lannes. J’ai vu beaucoup de ministres et de personnages officiels. J’ai surtout vu M. le Président de la République : à tout seigneur tout honneur. Je l’ai vu tous les soirs et jusqu’à plusieurs fois dans une même soirée. M. Poincaré à Ivry. Visite de l’hospice des vieillards, de l’école d’apprentissage du député maire Jules Coulant, ancien ouvrier mécanicien, et de l’asile des convalescens de Saint Maurice. M. Poincaré au Havre. La grande semaine des régates. La visite du Président de la République. M. Poincaré à Longchamp. La revue du 14 Juillet. Les troupes défilent devant le Président de la République.