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application. M. Pichon, recevant les membres du Congrès arabe leur a promis que la France, se ferait, à Constantinople et auprès de l’Europe, l’avocat de leurs revendications. Ce rôle est bien celui qui convient aux traditions de notre politique et à la confiance si honorable que les populations mettent en son intervention.

L’heure est décisive pour notre influence dans le Levant et en Syrie en particulier ; les populations syriennes ne peuvent pas supporter plus longtemps un régime que ne leur permet ni progrès économique, ni développement intellectuel, et qui ne leur accorde aucune part dans le gouvernement de leur pays. À qui leur assurera les réformes et les progrès qu’elles demandent, elles donneront leur confiance et leur fidélité. Elles préféreraient que ce soit à la France qui est leur amie séculaire, de qui ils tiennent leur culture nationale et ce besoin de lumière, de liberté et d’activité qui les anime aujourd’hui ; mais elles accepteront, de quelque main qu’elles les reçoivent, les avantages dont elles ne peuvent plus se passer. Le protecteur est celui qui, effectivement protège. C’est un axiome du bon sens qu’il ne sera pas besoin, nous l’espérons, de rappeler au gouvernement et à la diplomatie de notre pays. Une occasion unique nous est offerte de consolider, en Asie, l’Empire ottoman tout en assurant satisfaction aux aspirations légitimes des Syriens : c’est le triple intérêt de la France, de l’Europe, de la Turquie et des sujets du Sultan.

La question arménienne se trouve actuellement en présence de trois projets de solution : solution turque, solution indigène, solution européenne. Si la division de l’Empire en six grandes régions est réalisée, cette réforme, malgré les apparences, aboutirait à une plus complète centralisation de tous les pouvoirs entre les mains de six hauts fonctionnaires. D’après d’autres sources, le gouvernement songerait à diviser l’Arménie en deux grands vilayets. Quoi qu’il en soit, qu’il y ait ou non un inspecteur général, la Porte ne pourra se refuser à accepter les dispositions essentielles que les mandataires de la nation arménienne d’une part et l’Europe de l’autre sont d’accord pour lui proposer. Nous avons analysé le projet arménien, fondé sur le memorandum de 1895 ; « ses deux points essentiels se limitent à la nomination, par S. M. le Sultan, d’un gouverneur général européen, avec l’assentiment des Puissances, et à l’éta-