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LA GUERRE DE 1870[1]

LA RECULADE SUR LES LIGNES D’AMANVILLERS


I

Vers huit heures trente du soir, Bazaine se dirige vers le quartier général à Gravelotte. Sur la route, il rencontre de nombreux soldats d’infanterie appartenant à divers régimens qui suivaient la direction opposée à celle de l’ennemi et cherchaient où se reposer sans danger. Cette multitude devenait plus dense à mesure qu’on approchait de Gravelotte et le maréchal ne pouvait avancer qu’en se faisant ouvrir un passage par les cavaliers de son escorte. Il n’avait, disait-il, jamais rien vu de pareil, et ce spectacle lui arrachait des exclamations réitérées. Cependant, avec son calme habituel, il conseilla à ces malheureux de rejoindre leurs régimens. En route il rencontre Canrobert : « Où est votre corps ? demande-t-il. — Par-ci par-là, » répond Canrobert. En effet, à part la division Tixier, qui continue à occuper le bois de Saint-Marcel, le corps était disloqué sur tout le centre et la gauche de notre ligne.

Arrivé au quartier général, Bazaine prend connaissance des dépêches qui l’attendent. Parmi elles s’en trouvait une de Mac Mahon : « Je serai demain à Bar-sur-Aube avec toute la cavalerie. J’attends vos ordres à Bar-sur-Aube. » Une autre, du commandant de Verdun, annonçait qu’il n’avait que quatre jours de vivres pour toute l’armée. Ces dépêches lues, le maréchal

  1. Voyez la Revue des 1er et 15 juin 1913.