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-chistes d’Allemagne, d’Italie et d’Espagne. Elle participe à toutes les manifestations antimilitaristes, antipatriotiques ou autres. Elle publie un Manuel révolutionnaire donnant des recettes de bombes et d’engins explosifs. Deux autres groupemens anarchistes antimilitaristes, le Comité de Défense sociale fondé en 1905, avec une commission exécutive de 12 membres et 36 groupes provinciaux, et le groupe des Libérés des Bagnes militaires, fondé en 1910 par l’ancien disciplinaire Aubin, complètent les cadres de l’anarchie.

Mais, à côté des cadres, il faut des agens d’exécution, M. Dunois l’avait dit au Congrès d’Amsterdam : « Toute révolution s’accompagne nécessairement d’actes qui, par leur caractère en quelque sorte technique, ne peuvent être le fait que d’un petit nombre, de la fraction la plus hardie et la plus instruite du prolétariat en mouvement. » L’Organisation de combat sera cette armée permanente de l’anarchie. Elle fête sa naissance à Rambouillet le 12 août 1909. Elle a des filiales en province. Elle envoie à ses adhérens des instructions secrètes pour le sabotage des lignes télégraphiques, des avis sur la façon de se créer un alibi.

Enfin comme éclaireurs et délégués actifs de l’organisation de combat, voici les Jeunes Gardes révolutionnaires, institués en 1911 avec un comité exécutif, dont l’anarchiste Almereyda est le secrétaire général. Les Jeunes Gardes sont composés d’équipes de dix hommes « armés à la moderne, » c’est-à-dire de brownings, avec le mot d’ordre : « Sus à la police ! » On retrouve, depuis lors, les Jeunes Gardes dans toutes les manifestations violentes. Le journal la Guerre sociale est le moniteur de leurs exploits. « L’agent, écrit-il le 1er mai 1911, s’arrête net, porte les mains à son visage et chancelle. C’est le jonc d’un jeune garde qui, manié d’une main énergique, a porté. » Ainsi les anarchistes encadrés et mobilisés sont prêts à entraîner et à diriger les forces ouvrières dont ils ont, dès 1907, annoncé comme certaine la conquête. Ces forces ouvrières, que sont-elles, et que valent-elles ?

Lorsque la loi de 1884 eut autorisé la constitution des syndicats et des unions de syndicats, les ouvriers usèrent du droit nouveau qui leur était conféré, soit pour former des syndicats de métiers différens dans une même ville (Bourses du travail), soit pour constituer dans toute la France ou dans de vastes régions des syndicats d’un même métier (Fédérations). Au