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Paris, 5 février 1873.

Ma très hère amie, j’ai un beau-frère fort justement aimé qui a été presque mon enfant, que j’ai élevé, que j’ai marié, que j’ai confirmé dans l’amour de l’Église. Il meurt, laissant une pauvre jeune femme et quatre enfans. Mon frère a un enfant malade, ma sœur est au lit et je cours les chemins avec je ne sais quoi dans le dos. Vous comprenez que je veux des prières. Comme avec tout cela la mer est couverte de pirates, je ne vous en dis pas plus long. Sachez que j’aime bien que vous m’écriviez et que ce ne sont pas vos discours qui me font peur. Je sauterai quelques pages de l’Officiel et ce sera grand profit pour moi de toutes façons.

J’attends vos images et la personne qui me les apportera. Tout ce qui viendra de ma chère Léontine sera bien reçu. Vous entendez bien, ma chère Léontine. Il est positif que notre amitié, qui ne se savait pas même plantée, a tout à fait son âge et se porte et comporte comme une amitié de cinquante ans.

Donc, tout à vous.


Paris, 12 février 1873.

Ma très chère amie, Mme Sauvage est venue pendant que j’étais près de mon cher mourant. Elle m’a laissé votre lettre sans donner son adresse. Je regrette de ne l’avoir point vue. Elle m’aurait parlé de vous, et c’était tout ce qu’il fallait pour décrire la bonne voie. Si elle doit rester quelque temps à Paris, renvoyez-la-moi.

Peut-être recevrez-vous la visite d’un jeune garçon tout naïf et tout petit qui est le fils de mon ancien ami et que j’aime comme mon propre enfant. Il se nomme François Lafon, il est peintre et grand peintre. J’ai l’œil sur lui depuis son berceau, et je le porte tant que je peux à tout ce que je connais de beau en ce monde. Il n’a encore de bien ouverts que les yeux, mais la beauté entre et ouvrira le reste.

Si je ne me trompe, je vous avais promis la Vie de N.-S. J.-C. par ce petit journaliste de Chignac qui est devenu presque un bout d’homme après avoir fait une course aventureuse au Vatican. Je vous fais envoyer ce livre. C’est mon meilleur ouvrage, par la raison qu’il n’y a quasi rien de moi. Vous y trouverez