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doit être abandonnée. Si les trois recluses furent jamais cisterciennes, elles le devinrent plus tard, et elles ne l’étaient pas encore, quand elles inspirèrent notre auteur. Elles étaient sœurs, et vivaient retirées du monde, avec des servantes. De pieux amis s’occupaient de leur existence matérielle.

Elles avaient cherché la retraite, afin de prier et de méditer, de se consacrer aux bonnes œuvres. Elles étaient, semble-t-il, jeunes et belles, car l’auteur les félicite d’avoir suivi la voie austère, alors qu’elles brillaient de tout l’éclat de la jeunesse. Elles paraissent n’appartenir encore à aucun ordre défini : si on les interroge sur ce point, leur conseiller les engage à répondre qu’elles appartiennent à l’ordre de Saint-Jacques. Qu’est-ce à dire ? questionnera peut-être l’interlocuteur. Elles devront alors l’interpeller à leur tour, et lui demander où la religion est mieux définie que dans l’épitre canonique de saint Jacques :

« La vraie religion, déclare cette épître, consiste à visiter les veuves et les orphelins, dans leurs tribulations, et à se garder immaculé dans le siècle. »

Il y a double règle : règle extérieure, règle intérieure. La règle intérieure ne varie pas ; la règle extérieure varie, selon les circonstances. Celle-ci doit aider celle-là. Le jour où la règle extérieure deviendrait pour cette règle intérieure une entrave au lieu d’une aide, il faudrait consulter le confesseur sur les dispenses requises.

Si nos trois recluses ne dépendent encore d’aucun couvent, il ne convient nullement de supposer qu’elles se sont retirées du monde pour mener une vie paisible et oisive ; elles se sont astreintes à l’obligation de réciter les heures canoniales. Des versets de psaumes, des strophes d’hymnes, des formules de prières, leur sont indiqués. Nombreuses nous y retrouvons les formules de prières pour les morts. Il leur est recommandé de prendre quelques momens du jour et de la nuit pour penser à toutes les douleurs de l’humanité. Dans leur petite maison aux étroites fenêtres et aux épais rideaux, — l’auteur tient beaucoup à cette étroitesse des fenêtres et à cette épaisseur des rideaux, — elles ont le devoir d’éclairer et d’élargir leur âme, de l’élargir pour embrasser la pensée de toutes les misères humaines, et de l’éclairer aux rayons de l’amour divin. Nous devinons là quelques pressentimens de sainte Thérèse et de sainte Catherine de Sienne. Au XIVe siècle, sainte Catherine de Sienne recommande.