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l’attraction universelle, mais ce n’est là qu’un commencement : il faudrait savoir pourquoi il y a une attraction qui commande les révolutions des astres, et tout de suite nous comprenons que ce pourquoi nous échappera toujours.

L’homme n’exagérera jamais en parlant de son impuissance à connaître le Cosmos. Par delà les siècles, malgré tout son génie, il gardera la même douloureuse et irrémédiable impuissance.

Dès qu’on veut pénétrer la nature profonde des choses, et ne pas se contenter des apparences, on se heurte de tous côtés à des hypothèses, à demi démontrées parfois, mais tout de même indémontrables. En tout cas, quoique le mécanisme de certaines lois cosmiques soit vaguement entrevu, par lambeaux informes, la raison causale n’a même pas reçu un essai de solution.

Au milieu de cette obscurité épaisse, qui nous autorise à tout rêver, et qui nous défend de rien nier, apparaît une pâle lueur ; c’est, dans l’évolution des êtres qui vivent sur la surface terrestre, comme un vague dessein de progrès. A travers les siècles, par suite des lois biologiques, les formes de la matière vivante se sont compliquées, devenant de merveilleux mécanismes. Puis l’intelligence a apparu, confuse chez les êtres des premières époques géologiques, un peu moins fruste plus tard : c’est l’intelligence humaine, une force très imparfaite encore, mais pourtant bien supérieure aux autres forces qui s’agitent, aveugles, autour d’elle.

Si la vie a émergé de la matière inerte, si l’intelligence s’est dégagée de l’inconscience, c’est parce qu’une loi a dirigé dans ce sens-là les forces cosmiques. Personne n’oserait dire que cette loi a voulu la vie et l’intelligence, car le mot de vouloir est terriblement humain. Mais personne ne peut se refuser à reconnaître que le développement graduel de la vie et de l’intelligence était dans la destinée du globe terrestre. :

Et c’est une grande espérance pour l’avenir.


CHARLES RICHET.