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renouvelle par division ou se rajeunit, de sorte que, soit par la division, soit par le rajeunissement, elle s’assure l’immortalité.

Aussi sur le globe terrestre, qu’il s’agisse des fleuves, des lacs ou des océans, des forêts, des plaines ou des montagnes, la vie est-elle partout. Nulle goutte d’eau qui ne contienne des germes ; nulle parcelle de sol qui ne soit habitée.

Et cela était vrai déjà aux époques géologiques les plus anciennes. De par les quantités de carbone, d’oxygène et d’azote qu’elle possède, la terre comporte un certain maximum de vie, et que ce maximum a été atteint depuis des milliers et des milliers de siècles. Les formes ont évolué, les proportions des végétaux ou des animaux, des êtres supérieurs ou des êtres inférieurs, ont changé. Mais la quantité de matière vivante n’a guère varié ; car, depuis des milliers et des milliers de siècles, elle avait atteint sa limite, et toute cette vigueur d’expansion, qui continue sans relâche, s’était pleinement exercée déjà.

Mais, pour ce développement intense de la vie, il faut que chaque fragment de matière vivante porte en lui une force d’attraction très puissante. Chaque cellule est armée pour la lutte, et tend avec une telle ardeur à grandir et à se reproduire, qu’on ne peut s’empêcher de voir dans cette ardeur même une loi très générale, presque une caractéristique de la matière vivante.

Même il semble que les germes produits par les êtres soient beaucoup plus résistans que les êtres eux-mêmes. Les microrganismes qui se reproduisent par des spores sont assez fragiles : ils résistent mal aux variations de température, de pression, d’alimentation ; ils sont sensibles aux actions chimiques les plus faibles. Alors, si les conditions du milieu ambiant leur deviennent défavorables, comme s’ils comprenaient qu’ils ne peuvent plus continuer à vivre, aussitôt ils produisent des spores, granulations minuscules, prodigieusement résistantes, qui gardent longtemps, même dans des milieux hostiles, toute leur force végétative. Les bactéries périssent, mais leurs spores survivent ; et le maintien de l’espèce est assuré.

Chez les animaux supérieurs, des instincts compliqués, extraordinaires, d’une variété extrême, assurent la perpétuité de l’espèce, par la protection donnée aux germes, aux fœtus et aux nouveau-nés. Et il n’est pas besoin de les conter ou même de les mentionner ici, car ce serait l’histoire naturelle presque tout entière qu’il faudrait écrire.