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du Taureau ou τ d’Orion, dont l’éclat intrinsèque, ou, comme disent les physiciens, dans leur argot inélégant mais précis, l’intensité surfacique est des centaines de fois supérieure. Cependant, ces étoiles nous les voyons à peine dans les nuits sombres, et le moindre quinquet au coin d’une rue suffit à nous éblouir au point de les éclipser.


Ainsi les phénomènes qui se déroulent dans l’Univers et le parent ne sont grands ou petits, négligeables ou éclatans pour nous, que selon leur proximité. Et il y a quelque ironie douloureuse à penser que cela n’est pas moins vrai dans le monde moral que dans l’autre.

Une chose pourtant doit nous consoler, c’est que les forces obscures qui attirent et dirigent les êtres vivans sont capables de nous montrer une perfection qui est absente des étoiles. Un exemple, qui se rapporte précisément à notre sujet, nous le prouvera une fois de plus : nous avons vu que le rendement lumineux de toutes les sources physiques de lumière est toujours imparfait et qu’en dehors de leurs rayons visibles nos lampes artificielles, comme les grands luminaires célestes, en émettent d’autres qui sont inutiles pour la vision. Au contraire, la femelle du ver luisant, du pyrophorus noctilocus des naturalistes, émet, lorsque par les douces nuits d’été, elle veut appeler le mâle ailé, un rayonnement dont la totalité est composée de vibrations lumineuses. L’énergie qu’elle dépense ainsi est tout entière utilisée pour ses fins. Son rendement lumineux est parfait, et l’amour a su faire, chez cet insecte misérable, ce que tous nos laboratoires et toutes nos industries n’ont pas encore réalisé.


CHARLES NORDMANN.