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résister à des températures plus élevées que celui-ci, c’est-à-dire pouvant supporter, à section égale, des cour ans électriques plus intenses.

Mais ce n’est pas tout : non seulement la puissance lumineuse d’un corps incandescent augmente beaucoup avec sa température, mais son rendement lumineux fait de même, ce qui est la question essentielle au point de vue industriel et pratique, qui domine tout en ces matières. Quand une lampe à incandescence fonctionne, elle n’émet pas seulement de la lumière mais aussi de la chaleur, comme on peut s’en assurer en la touchant. Une partie du courant électrique est donc employée en pure perte à produire cette chaleur. Or on appelle rendement lumineux de la lampe le rapport de l’énergie lumineuse qu’elle émet à l’énergie totale qu’elle consomme. Si toute l’énergie consommée était transformée en lumière, c’est-à-dire si la lampe n’émettait que des rayons visibles et pas de rayons calorifiques invisibles, le rendement serait de 100 p. 100. Nous verrons ci-dessous que ce cas idéal n’est réalisé dans la nature qu’en une seule circonstance. Pratiquement, on exprime le rendement lumineux d’une lampe en watts par bougies[1], et le rondement est d’autant meilleur que la lampe consomme moins de watts par bougie lumineuse émise.

Or le rapport de la lumière émise à la radiation totale (ou si on préfère à l’énergie consommée) d’un corps incandescent, son rendement lumineux augmente, nous l’avons dit, très rapidement avec sa température. Pour une même énergie utilisée, il émet par exemple environ 6 fois plus de lumière à 3 000° qu’à 12 000°, 2 fois plus à 4 000° qu’à 3 000°.

Pour toutes ces raisons, il y avait intérêt à substituer au carbone des filamens de substances résistant aux hautes températures. On y est parvenu en étirant des filamens de métaux fondant aux températures

  1. Le watt qui est, rappelons-le, l’unité internationale pratique de puissance, est à peu près la 735e partie du cheval-vapeur, c’est-à-dire un peu plus du dixième de l’énergie mise en jeu par un kilogrammètre en une seconde. Le kilogrammètre est lui-même le travail que produit un kilogramme en tombant d’un mètre. Au point de vue purement électrique, le watt est l’énergie mise en jeu en une seconde par un courant électrique d’un ampère traversant une résistance d’un ohm.
    Quant à la bougie, elle était jusqu’à ces derniers temps assez mal définie comme unité de lumière et sa valeur changeait d’un pays à l’autre. Depuis le 1er juillet 1909, l’Angleterre, les États-Unis et la France ont unifié leur valeur de la bougie et depuis lors on appelle bougie internationale ou bougie décimale une intensité lumineuse qui est d’environ un quart inférieure à celle de la bougie française de l’Étoile et qui est définie comme étant exactement la 20e partie de l’étalon international appelé le Violle, du nom de l’illustre physicien français qui l’a imaginé. Le Violle est la quantité de lumière émise normalement par un centimètre carré de platine à sa température de fusion.