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pour trouver un commencement d’organisation de l’éclairage public.

Il est remarquable que ce sont les malfaiteurs, coupeurs de bourses, tire-laine et mauvais garçons à qui Paris est redevable des premiers essais faits dans ce sens, — et ceci pourrait servir d’argument au docteur Pangloss s’il n’était mort depuis longtemps sans laisser de descendance. En 1318, les meurtres étaient si fréquens aux environs du Châtelet que Philippe V ordonna qu’une chandelle fût entretenue, toute la nuit durant, à la porte du palais. Pendant deux siècles, l’éclairage public fut réduit à cette unique chandelle, et les bourgeois qui d’aventure s’en allaient nuitamment en d’autres quartiers durent parfois la trouver insuffisante. Restait la ressource d’avoir des valets portant des torches et flambeaux ; mais ce n’était pas à la portée de toutes les bourses. C’est ce que comprit Louis XIV lorsque, par lettres patentes de 1662, il céda à un concessionnaire le droit d’installer de place en place des porte-lanternes qui, moyennant une menue redevance (cinq sols par quart d’heure), se mettaient à la disposition des passans.

En 1667 paraît un édit du lieutenant de police La Reynie, qui institue en réalité le premier éclairage public, et impose aux bourgeois de chaque quartier la charge d’entretenir aux carrefours des lanternes éclairées par des chandelles. Dès la fin du XVIIe siècle, il y avait à Paris 6 500 de ces lanternes brûlant par nuit 1 625 livres de chandelles. L’exemple de Paris fut bientôt suivi-par les grandes villes d’Europe.

Un siècle plus tard, nouveau progrès avec les réverbères à l’huile, dont M. Sartine écrivait naïvement au Roi : « La lumière qu’ils donnent ne permet pas de penser que l’on puisse jamais trouver mieux ! » Que dirait M. de Sartine s’il pouvait passer de nos jours, sur le coup de minuit, avenue de l’Opéra ? Perfectionnés par Argand dont les découvertes furent d’ailleurs subtilisées par un nommé Quinquet, qu’elles ont rendu célèbre, les réverbères ne furent détrônés que par le gaz, brûlant dans le bec papillon, et qui, jusque vers la fin du XIXe siècle, devait assurer, à peu près sans rival, l’éclairage des grandes villes.

Enfin survint l’éclairage électrique sous ses diverses formes, lequel semblait devoir supplanter rapidement le gaz, lorsque celui-ci, grâce à la découverte du manchon à incandescence, reprit vaillamment la lutte, suscitant par cela même de nouveaux perfectionnemens dans les lampes électriques.

C’est l’histoire et la portée de ces récens perfectionnemens des divers modes d’éclairage que nous voudrions passer rapidement en revue.