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de Londres ; par le transafricain français, continué à travers le Congo belge, le trajet serait de dix à douze jours. Aussi les Anglais, qui sont gens d’affaires, ont-ils volontiers approuvé l’innovation proposée en France ; ils apporteront certainement une clientèle au futur chemin de fer. Nous en dirons autant des Belges. Le chemin de fer du bas Congo, chef-d’œuvre de patience et de volonté du colonel Thys (1889-1898), leur a ouvert le bassin intérieur avec son réseau navigable ; ils ont déjà doublé par des voies ferrées les rapides du Congo supérieur ; mais malgré tout, le chemin de fer, sans transbordement, venant du Nord, étendrait leur prise de possession de la zone la plus forestière et raccourcirait d’au moins moitié le voyage d’Europe au coude septentrional du Congo. Entre les empires de la France et de l’Angleterre, le transafricain ne servirait pas moins utilement le domaine équatorial des Belges.


Ainsi, du Soudan au Cap, deux nations européennes seraient intéressées directement au chemin de fer projeté ; ce sont l’une et l’autre des nations amies de la France et dont les besoins en Afrique se rapprochent beaucoup des nôtres : il leur faut avant tout, pour coloniser leurs possessions, en faciliter l’accès et la traversée par des Européens. Pour répondre à cette nécessité fondamentale, le transafricain sera essentiellement une ligne de voyageurs. Sur l’ensemble de sa longueur, 10 à 11 000 kilomètres, les quelque 2 000 du Sahara ne seront qu’une section ennuyeuse à franchir ; par delà, c’est immédiatement la zone colonisable qui commence, avec les pâturages du Soudan. Le tronçon septentrional du transafricain, au moment où l’Europe se plaint des soucis de la vie chère, met aux portes de la France, à quatre jours de l’école de Grignon, dit M. André Berthelot, d’immenses terrains d’élevage, une Argentine ou une Australie françaises. Ne suffirait-il pas de ces possibilités pour attirer un courant de voyageurs ? Mais le transafricain transportera aussi les forestiers en route pour le Congo, les prospecteurs de cuivre, de diamant, d’or allant au Katanga et au Transvaal, tout le personnel des Compagnies financières engagées dans l’exploitation de ces richesses. Sur de si longs parcours, pour une pareille clientèle, il faut des transports non seulement rapides, mais aussi peu fatigans que possible, donc des trains de vitesse et des voitures confortables, ce qui comporte voie large,