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anglaises ; ainsi la rouie fluviale du bas Niger, prolonge par son affluent de gauche, la Bénoué, échappe à notre contrôle ; les Anglais de la Nigeria, puis leurs voisins allemands du Cameroun reculent leurs frontières intérieures jusqu’au lac Tchad ; une masse dense de territoires étrangers s’interpose entre les colonies françaises de l’Afrique Occidentale et de l’Afrique Equatoriale, qui ne pourront plus se joindre que derrière le Tchad. Tout récemment, le traité franco-allemand du 4 novembre 1911, en cédant au Cameroun de vastes districts congolais, a écarté encore de la côte du Gabon la ligne de nos communications indépendantes à travers l’Afrique Equatoriale ; mais, si le Soudan oriental se trouve, de ce chef, rapproché de notre Ouest africain, l’isolement de notre Congo en est plus formel.


Ainsi les trois tronçons de l’Afrique Française demeurent séparés. Chacun d’eux prend sa part d’un mouvement commercial en progrès, développé vers l’extérieur, mais leur union économique et politique n’a pas encore été réalisée. Des patriotes clairvoyans ont cependant compris que cet admirable essor colonial, tout spontané à l’origine, devait être soutenu ensuite par une volonté, par une méthode nationales. De ces préoccupations est né, en 1890, le Comité de l’Afrique Française. « Dans le partage de l’Afrique, disait le programme des fondateurs, la France a droit à la plus grande part, en raison des efforts qu’elle a faits pour le développement de ses possessions de l’Algérie-Tunisie, du Sénégal et du Congo. » Le plan initial était d’organiser des missions qui, parties de ces trois groupes, se donneraient rendez-vous sur les bords du lac Tchad. Nous n’avions sur ce lac que des renseignemens incomplets et fragmentaires, ceux de Barth (1850), de Gerhard Rohlfs (1866), de Nachtigal (1870). Mais il occupait en quelque sorte le centre géométrique de nos domaines africains ; la jonction de tous nos territoires sur ses rives était une expression claire et concise des besoins nouveaux de l’expansion française en Afrique.

Précisément au moment où se constituait le Comité, la France et l’Angleterre signaient leur accord du 5 août 1890. Par cette convention, en échange de concessions dans l’Afrique orientale, nous obtenions la reconnaissance de la suzeraineté française sur toute l’étendue saharienne, entre l’Algérie-Tunisie et le Soudan nigérien ; maigre cadeau, raillait lord Salisbury,