Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 16.djvu/656

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Allemands de mieux doter un organisme de défense pure qu’un organisme d’offensive. Il faut pourtant reconnaître que, dans le cas qui nous occupe, comme dans celui de Borkum dont nous allons parler, la mise en jeu de la plus puissante artillerie prévue par la maison Krüpp serait justifiée pour un ouvrage de côte.


C’était un sujet d’étonnement pour ceux qui suivaient de près le développement de la puissance maritime allemande et qui en mesuraient d’avance les répercussions inévitables, que la position de Borkum, à l’embouchure de l’Ems, restât inoccupée et sans aucune protection. Cette lacune de l’organisation défensive du littoral de la mer du Nord est aujourd’hui comblée, ou du moins on peut considérer les travaux de cette ile comme devant être très prochainement terminés, ainsi que ceux de Wangeroog.

Il ne s’agit pas seulement, en occupant Borkum, de donner un point d’appui à l’aile gauche du dispositif général de la flotte allemande faisant face, dans l’attitude de défensive active dont nous parlions tout à l’heure, à la puissante flotte anglaise. Ce serait là de la stratégie un peu abstraite.

La détermination de l’Etat-major allemand s’appuie sur des motifs plus concrets, sur la constatation d’avantages bien positifs, de l’ordre militaire, de l’ordre nautique, de l’ordre politique même.

Mouillée sous Borkum, dans le chenal de l’estuaire de l’Ems appelé Randzel-Gatt, et qui est d’ailleurs d’un accès plus facile que la Jade, tout en étant susceptible d’une défense très complète par les mines sous-marines, la flotte allemande est dans une position sensiblement plus offensive, plus menaçante pour le littoral anglais, qu’au mouillage de Schillig-horn, derrière Wangeroog. Elle gagne du moins une soixantaine de milles, ce qui n’est pas indifférent.

Notons encore, — et ceci n’est pas d’une mince importance, — qu’elle est là tout juste à la limite des eaux allemandes et des eaux hollandaises. Sur son flanc gauche s’étendent les digues des polders de la province de Groningue et, en avant de ces terres basses, en face de Borkum même, s’élève, à quelques mètres au-dessus des derniers bancs de l’Ems, la dernière île de la Frise Occidentale ou Frise Batave, Rottum. Si l’on ajoute à cela qu’Emden, l’actif port de l’Ems, n’est qu’à 9 milles de rivière, — l’Ems lui-même, — du port hollandais de Delfzijl et