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le fort de Kügelbaake, ou bien s’établir sur l’îlot de Neuwerk, à 12 kilomètres en avant ; et l’on serait là bien « en l’air. »

Cüxhaven, au surplus, ne redoute pas un passage de vive force, tant on y a accumulé d’engins de défense sous-marine. Elle ne craint pas non plus d’être surprise, car, outre qu’elle est directement couverte par Helgoland, dont nous allons parler tout à l’heure, cette place maritime a une station de dirigeables et d’aéroplanes, remarquablement organisée. Les Allemands font quelque bruit, — car, du côté de l’aéronautique, leur orgueil commande leur prudence, — des quatre grands hangars tournans qui vont, au parc de Nordholtz, abriter leurs Zeppelin ou leurs Schütte-Lanz.


Laissons de côté Brunsbüttel et la sortie du canal Kaiser Wilhelm, bien que l’on affirme qu’il est fort question d’y construire des batteries, qui n’auront sans doute pour objet que d’écarter des écluses les torpilleurs ou les sous-marins, — mais comment faire pour découvrir ceux-ci en temps utile ? — qui auraient pu échapper aux vues de Cüxhaven et franchir sans dommages ses lignes de torpilles. Passons aussi devant l’embouchure de la Weser et devant Bremerhaven sans rien ajouter à ce que nous avons dit au début de cette étude de ses ouvrages à coupoles ou à boucliers-voussoirs en fonte dure, parce que la position est, par elle-même, dépourvue d’intérêt stratégique. Nous voici à l’entrée de la Jade, dont l’estuaire a d’ailleurs le même vestibule que celui de la Weser, mais dont la seule passe praticable en tout temps pour les grandes unités s’incline vers le Nord-Ouest, puis vers l’Ouest, le long de l’ile de Wangeroog.

Wilhelmshaven est là, au fond, à 34 kilomètres de la passe extérieure de Wangeroog, par conséquent, mieux encore que Kiel, abrité des coups de l’artillerie des vaisseaux. Il y a quelque dix ou douze ans, avant la guerre russo-japonaise et la destruction de la marine russe, avant, surtout, la phase aiguë, — qui n’est pas près de finir, quoi qu’on en puisse dire, — de la rivalité maritime anglo-germaine, l’arsenal et les établissemens de Wilhelmshaven abandonnaient le premier rang à ceux du grand port militaire de la Baltique. Aujourd’hui que l’essentiel théâtre d’opérations de la flotte allemande est évidemment la mer du Nord, c’est la Jade qui l’emporte, et il n’est point d’exercice financier qui ne marque les progrès de son port par l’attribution d’importans crédits destinés à de nouveaux bassins à flot,