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s’est vainement efforcé de rajeunir par des améliorations de détail, sont exactement en bordure de la dune littorale. Les énormes projectiles des cuirassés modernes creuseraient dans l’estran de profonds sillons, projetant sur les pièces et les servans d’épaisses gerbes de sable fin qui paralyseraient le tir, jusqu’à ce qu’enfin quelques coups bien réglés vinssent percer les insuffisans coffrages et tout bouleverser, plates-formes, magasins, casemates et canons.

Nous avons déjà remarqué combien il est surprenant que nos voisins de l’Est aient renoncé aux ouvrages à protection métallique et aux coupoles fermées, dont ils avaient de bons modèles en Hollande, tout près d’eux, à supposer qu’ils n’eussent pas été satisfaits de leur expérience d’il y a quarante ans, à Bremerhaven, Ce n’est d’ailleurs pas à nous de les conseiller et il se peut qu’ils aient, pour justifier la notoire faiblesse de leurs batteries de côte, aussi mal placées que mal abritées, des raisons d’un ordre qui nous reste inconnu. Il est certain que, d’une manière générale, ils font confiance à la défense mobile maritime plus qu’à la défense, fixe, aux bâtimens plus qu’aux batteries. Il est certain aussi que la marine russe, — la seule qu’ils jugent avoir à craindre dans la Baltique, bien convaincus qu’ils sont de pouvoir fermer les détroits danois aux deux autres, — ne leur paraissait pas jusqu’ici en état d’agir vigoureusement contre leur littoral. Cette opinion se modifie en ce moment, nous l’avons dit, et il est possible que l’on juge à propos d’adopter, pour les points les plus intéressans, un type d’ouvrage plus solide, plus résistant, mieux armé aussi, que le type traditionnel.

Swinemünde serait, suivant toute apparence, appelée à bénéficier de cette réforme. Outre l’intérêt qui s’attache à la protection de la bouche principale de l’Oder et du « See-Hafen » de Stettin, si important par ses grands chantiers de Vulkan, il faut signaler celui qui résulte du fait que ce port est le point de la côte Baltique le plus rapproché de Berlin (160 kilomètres), et qu’un débarquement y serait très facile sur les magnifiques plages d’Aalbeck et de Heringsdorf, aussitôt que les batteries dont nous parlions tout à l’heure auraient été réduites.

Ce n’est pas tout : Swinemünde est le seul point d’appui que puisse utiliser une force navale qui aurait la charge de défendre contre une descente la grande île de Rügen, puisque Stralsund, qui n’est séparé de Rügen que par un étroit canal d’eau salée,