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Malheureusement, place là, un ouvrage, à moins d’être organisécomme une vraie place forte, noyau d’une région défendue par des troupes mobiles, serait tout à fait « en l’air, » exposé à être pris à revers, battu de tous côtés et détruit avant qu’il pût être secouru, car la distance est fort longue, par terre, de Danzig au bout du Nehrung. Déjà le fort d’Adler-Horst, beaucoup plus rapproché, serait encore en dehors du rayon de protection immédiate de la place.

Cette place elle-même n’est pas très facile à défendre contre une attaque conduite dans les formes et avec des moyens suffisans. Des raisons de l’ordre topographique ne permettent guère de lui donner la ceinture complète de forts détachés qui lui serait nécessaire, et si, du côté de l’Est, elle peut toujours compter sur les inondations de la Mottlau et de la Vistule, du côté de l’Ouest elle ne semble pas dans une situation beaucoup plus satisfaisante qu’il y a cent ans, lors des grands sièges de 1807 et de 1813-1814[1].

Aussi n’est-ce pas à Danzig même que les Allemands comptent défendre Danzig, c’est à Kœnigsberg, la capitale historique des duchés de Prusse, placée sur la route de Russie à 180 kilomètres en avant du grand port polonais. Kœnigsberg était déjà une place très forte, que l’on va renforcer encore, d’après le texte même de la loi soumise au Reichstag. Notons ici, sans y insister autrement que, logiquement, son port de haute mer, Pillau, placé juste à la coupure que la Pregel a pratiquée dans le Nehrung du Frischehaff, devrait bénéficier d’une part des améliorations que l’on se propose d’apporter aux défenses de Kœnigsberg. Par le canal nouveau, creusé à 6 mètres au moins, qui relie les deux places et qui double avantageusement l’ancien chenal de la Pregel, des bâtimens d’un assez fort tonnage, des canonnières russes pourraient prendre telle position fort gênante, pour la garnison et les habitans de Kœnigsberg.

Mais la défense de Pillau, où tout est à peu près au niveau de la mer, est encore plus difficile à organiser que celle de Danzig.


Swinemünde, au débouché de l’Oder dans le golfe de Poméranie, est dans un cas analogue. La situation y est même plus fâcheuse, parce que les deux batteries déjà anciennes, que l’on

  1. On rase en ce moment les antiques remparts en terre de l’enceinte de Danzig.