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défense du littoral, lui fera, prochainement sans doute, relâcher son emprise sur des organismes auxquels il n’a peut-être pas donné toute la puissance, toute l’efficacité nécessaire, faute de matériel exactement approprié aux besoins.

Si, en Allemagne, les difficultés résultant de l’état de choses dont les vices apparaissent nettement aujourd’hui chez nous ont pu être en partie évitées, grâce à la justesse des principes directeurs auxquels nous faisions allusion tout à l’heure, les ouvrages, les armes, les engins de défense des côtes ne semblent cependant pas, — et nous allons le voir, — complètement à la hauteur des exigences actuelles.

Restés pendant longtemps, en ce qui nous touche, sous l’impression rassurante de l’inaction de la flotte française en 1870 ; peu disposés, pour bien des motifs, à craindre l’intervention de celle de la Russie[1], puis, plus tard, exclusivement préoccupés d’accroitre rapidement l’élément le plus actif de la défense du littoral, la flotte, les Allemands semblaient jusqu’ici assez ménagers de leurs deniers quand il s’agissait des élémens fixes de cette défense. Du moins ne s’étaient-ils mis vraiment en frais, — et le choix du lieu est fait pour surprendre, — qu’en faveur de l’estuaire de la Weser, à Bremerhaven où, vers 1873-1875, furent construites trois batteries dont les bouches à feu étaient protégées par des coupoles ou boucliers en fonte Gruson. Soit que le prix de revient de ces ouvrages ait paru trop élevé, soit que, comme on l’a dit, la résistance au choc répété des projectiles se soit révélée insuffisante pour ce type de fonte dure, la protection métallique a été abandonnée et l’on est revenu, pour ne s’en plus écarter, au modèle classique de batterie de côte, où les pièces tirent à ciel ouvert, au-dessus d’un parapet dont le coffre, revêtu ou non de terre et de gazon, est constitué par un bloc plus ou moins épais

  1. Ces dispositions se modifient aujourd’hui que la marine russe se reconstitue très rapidement dans la mer Baltique. Et c’est très probablement en vue des entreprises éventuelles de cette marine que l’on va remanier certaines parties de l’organisme défensif sur cette mer, de même que la menaçante concentration des forces navales anglaises dans la mer du Nord a conduit, comme nous le verrons, à perfectionner l’armement des places maritimes de ces parages. Rappelons ici que dans deux ans la flotte russe de la Baltique comptera : 7 cuirassés de ligne, dont 4 « Dreadnoughts » de 23 000 tonneaux ; 4 croiseurs cuirassés « de combat, » qualifiés de « super Dreadnoughts » et du port de 32 000 tonneaux ; 6 croiseurs cuirassés moins puissans, de 8 000 à 14 000 tonneaux, et un grand nombre de bâtimens légers de toutes catégories.