sont contens de leur sort et, ce qui est plus remarquable, payent régulièrement leurs fermages. On pouvait craindre le contraire. Mais, par rapport au chiffre total de la population rurale en Angleterre, le chiffre est faible. Comme l’a fait très justement observer M. Paul Leroy-Beaulieu en réponse à la communication de M. Bardoux, il faudra, à ce train, quelques centaines d’années pour arriver en Angleterre à une transformation du régime foncier. Ce serait marcher bien lentement. M. Lloyd George est tout à fait de cet avis. Aussi a-t-il inventé un procédé plus expéditif. C’est de forcer les Landlords à mettre eux-mêmes leurs terres en vente en les accablant d’impôts. Tel était bien le but ouvertement avoué et poursuivi par lui, lorsqu’il surchargeait les héritiers de grands domaines de droits de succession si lourds qu’ils ne pouvaient y faire face qu’en vendant une partie de ces domaines. Et il y a en partie réussi. Avant même le budget de M. Lloyd George, le mouvement avait déjà commencé et le faible rendement des terres avait déterminé un certain nombre de propriétaires fonciers à en vendre une partie pour chercher ailleurs, par exemple en achetant des terres au Canada, un placement plus rémunérateur. Le duc de Sutherland, qui était un des plus grands propriétaires fonciers de l’Angleterre et qui vient de mourir, avait donné l’exemple, et mis en vente une partie de ses vastes domaines. Depuis le budget de M. Lloyd George, le mouvement s’accélère. J’ai été frappé, en me promenant dans les rues de Londres, du grand nombre d’agences immobilières qui, par de vastes affiches, annoncent la vente de domaines et s’efforcent de provoquer des offres d’achat. Quelques-unes de ces agences font, m’a-t-on dit, des affaires considérables. Par le double jeu du Small holdings and allotments act et des droits de succession écrasans, les Radicaux espèrent arriver à détruire les grands domaines et à reconstituer cette race des moyens propriétaires, qui était autrefois une des forces de l’Angleterre et qui a disparu, il n’y a relativement pas très longtemps, car ce n’est guère que depuis deux cents ans que ces immenses domaines se sont formés peu à peu. M. Bardoux croit au succès rapide de leur entreprise. Il s’afflige à la pensée devoir les beaux parcs anglais détruits, les vieux chênes coupés, et il se borne à espérer qu’on épargnera les anciens châteaux.
A ce programme qu’opposent les Conservateurs ? Eux, non plus, ne méconnaissent pas la nécessité d’une transformation