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d’accord, Unionistes et Libéraux, pour dire qu’elle ne peut durer. Mais quel remède ? Chacun des deux partis a le sien. Je ne prétends pas décider quel est le meilleur. Je ne voudrais qu’exposer sommairement en quoi chacun des deux remèdes consiste.

En 1907, le ministère libéral a fait voter une loi qui a pour titre : The small holdings and allotments act. En vertu de cet acte, les conseils de comté, les conseils paroissiaux et municipaux, ruraux ou urbains, sont tenus, dans un certain délai, de se procurer par voie d’achat ou d’expropriation des terrains qu’ils doivent rétrocéder à des journaliers agricoles ou à des ouvriers industriels, soit par voie de revente, soit en leur louant pour une période indéterminée. Cette loi avait surtout pour but, dans la pensée de ses auteurs, de créer une nouvelle catégorie de citoyens, des fermiers d’Etat qui cultiveraient pour leur compte mais payeraient une redevance à l’Etat, représentée sous ses diverses formes. Généralisée, ce serait une conception socialiste. Le sol nationalisé rentrerait en possession de l’Etat, seul propriétaire. Les citoyens ne seraient plus que des fermiers. Dans les premiers temps, cette loi paraissait vouée à un échec. Les futurs tenanciers ne mettaient pas beaucoup d’empressement à se présenter. Ils se méfiaient des conseils de comté ou des conseils municipaux comme propriétaires ; ils craignaient, non sans raison, qu’ils ne fussent plus exigeans que les Landlords et ils trouvaient que ces nouveaux propriétaires louaient plus cher que les anciens, ce qui est naturel, la redevance comprenant l’amortissement du prix d’achat. Puis, peu à peu, la confiance est venue. D’après une communication très intéressante faite par M. Bardoux à l’Académie des Sciences morales, au 31 décembre 1911, la situation était celle-ci : 35 503 hectares étaient loués à 7 077 tenanciers ; 1 640 hectares étaient exploités par des associations coopératives. Enfin, par l’intermédiaire des conseils de comté, 2 600 candidats aux petites exploitations avaient obtenu de gré à gré des propriétaires le morcellement de 12 800 hectares. En résumé, 12 500 Anglais et Gallois[1] sont devenus des petits fermiers.

Douze mille cinq cents, c’est un succès assurément, au point de vue moral surtout, car il parait que ces nouveaux tenanciers

  1. Une législation différente, assez semblable à la législation irlandaise, dans le détail de laquelle il serait trop long d’entrer, est appliquée en Ecosse.