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parvenir. Dans les sous-sols, l’imprimerie, à laquelle 75 compositeurs linotypes sont attachés, et les puissantes machines rotatives. On me dit que la composition, l’impression, la distribution du numéro entre les agences, les abonnés et les bureaux de vente, met en mouvement, tous les soirs, environ 700 personnes au total, rédacteurs et distributeurs compris. Le journal fabrique lui-même son électricité et son papier, qui attend dans les caves en formidables rouleaux. Il se compose de 24 pages et se vend deux sous. Ce sont les annonces qui couvrent les immenses frais.


Lundi, 30 juin.

Journée très bien remplie, très variée, mais un peu intense.

J’ai débuté par assister à l’ouverture du congrès international pour la répression de la Traite des Blanches. Je savais que la France devait être représentée dignement à ce congrès, entre autres par M. de Laboulaye, qui a remplacé mon respecté confrère M. Bérenger à la présidence de la Ligue Française contre cet odieux trafic, et par la marquise de G..., présidente du Comité parisien de l’Association catholique de la protection de la jeune fille. J’avais promis à nos délégués français de me joindre à eux, au moins pour cette séance d’ouverture. La carte d’invitation n’annonce pas moins de huit discours, plus trois réponses. Parmi les orateurs promis, figurent l’archevêque anglican de Cantorbéry, l’archevêque catholique de Westminster et le grand rabbin. C’est un congrès non confessionnel et neutre, ou je n’y entends rien. Aussi je me demande si, pour avoir assisté à un congrès de ce genre, notre archevêque ne serait pas attaqué à Paris, voire ailleurs, par quelques intransigeans.

Le congrès s’ouvre à l’heure dite : 10 h. 30, A. M. par un discours du Lord lieutenant d’Irlande, Lord Aberdeen, qui a un fort bon air de grand seigneur anglais, mais qui prononce un discours quelconque. Lady Aberdeen, sa femme, présidente du Conseil international des femmes, lit, ensuite, un discours charmant, simple, de bon goût, qu’elle termine ainsi : « Il faut distinguer entre ce qui est difficile et ce qui est impossible. Ce qui est difficile doit être fait tout de suite : pour ce qui est impossible, on peut attendre à demain. » L’archevêque de Cantorbéry parle ensuite, avec beaucoup de gravité et d’onction, puis c’est le tour du cardinal Bourne. Au moment où il se lève, je me