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sens certainement opposé. Il donna sa démission et ne la retira que sur les instances de l’Impératrice.

On ne révoqua pas la mission confiée au prince, mais on pria l’Empereur de ne plus recommencer. L’Empereur promit de ne plus accomplir aucun acte de gouvernement de même que, au camp, il ne s’occuperait plus des opérations ; Mac Mahon n’aurait à correspondre qu’avec le maréchal Bazaine et le ministre de la Guerre. Depuis, « dans tout le cours des opérations, jamais l’Empereur ne s’est opposé aux mouvemens ordonnés et ils ont toujours été commandés par le maréchal et non par lui. » II se fit aussi petit qu’il put. Il renvoya à Paris les deux tiers de ses voitures ; chaque officier ne conserva plus qu’une cantine. Il alla même jusqu’à se séparer du chirurgien mis à sa disposition par Nélaton, Anger. La pierre étant enchatonnée, l’Empereur jouissait de quelques momens de répit ; mais, atout instant, il était à craindre que la crise ne revint, et lorsque l’Impératrice apprit la présence du jeune chirurgien à Paris, elle le fit venir et le supplia de retourner au quartier général.

Le 15 août, défense avait été faite aux fonctionnaires de se rendre à la fête impériale en costume officiel ; désormais on ne rendra plus aucun honneur. Lui, si fier, il subira en silence toutes les humiliations, et il se traînera, dans sa voiture de parc, derrière cette armée dans laquelle il ne sera plus qu’un bagage vivant. Tombé au fond de l’abime, l’Empereur pensa que si le ministère du 2 janvier eût été encore aux affaires, il ne se serait pas opposé aux résolutions de la conférence de Châlons, et les aurait, au contraire, sanctionnées avec empressement. Un élan de cœur vers ces serviteurs dévoués, qu’on avait sacrifiés parce qu’ils n’avaient pas voulu qu’on le sacrifiât, lui fit oublier sa détresse personnelle et exprimer dans une lettre touchante, que j’ai déjà donnée, son regret d’être séparé d’eux.

Le sort de l’Empereur est maintenant fixé. Que va devenir son armée ?

Ici commence la tâche de Palikao.


VIII

Palikao a systématiquement méconnu ce que ses prédécesseurs avaient accompli dans les quelques jours qui suivirent notre défaite, et, en bien des points, il s’est attribué une initiative