Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 16.djvu/461

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
REVUES ÉTRANGÈRES

LA CORRESPONDANCE AMOUREUSE D’UN ROMANCIER ALLEMAND


Gustav Freytag, Briefe an seine Gattin, 1 vol. in-8o, publié par Mlle Hermance Strakosch-Freytag, Berlin, 1913.


Le public français aura sans doute oublié jusqu’au nom du romancier allemand Gustave Freytag, auteur d’un certain Doit et Avoir dont la traduction en trois ou quatre volumes appartenait autrefois à la catégorie de ces « livres de lecture, » éminemment inoffensifs, qu’un collégien était à peu près assuré de rencontrer dans la bibliothèque de son « étude. » En Allemagne même, les romans, comédies, et autres innombrables écrits de Gustave Freytag ne doivent plus guère trouver de lecteurs ; et personne, en tout cas, ne s’y avise plus d’associer aux vivans récits d’artistes originaux, tels qu’un Théodore Fontane ou un Gottfried Keller une œuvre où de très précieuses qualités de sagesse pratique et d’application ne sauraient suffire à compenser un manque .absolu de toute « poésie. » Mais l’auteur de Doit et Avoir n’en demeurait pas moins pour ses compatriotes, jusqu’à ces temps derniers, le représentant presque « typique » d’une génération d’hommes de lettres chez qui la personne intime aussi bien que le talent étaient faits surtout de conscience et de probité, d’attachement passionné aux vieilles traditions morales de la race. On se rappelait la phrase, orgueilleuse et touchante, d’une lettre de Freytag à l’historien Henri de Treitschke : « Vous et moi, nous sommes de l’espèce de ces êtres d’exception qui vivent un peu pour soi-même, un peu pour leurs amis, mais bien plus encore pour leur peuple ! » On savait que, ami et conseiller de plusieurs souverains, il avait toujours obstinément