Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 16.djvu/41

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec les siens, et on ne douta plus que nous ne fussions en position sur les hauteurs devant Metz. Mais il restait un point incertain : quelle était l’étendue de notre front ? Où commençait-il ? Où finissait-il ?

Faute de réflexion, ils nous crurent d’abord établis entre le Point-du-Jour et Montigny ; ils ne tardèrent pas à comprendre qu’une armée aussi considérable ne pouvait pas tenir dans un espace aussi restreint, et, ne voyant pas encore toute la réalité, ils s’en rapprochèrent en supposant notre ligne étendue jusqu’au Nord à Amanvillers.

« En présence d’une position défensive, l’action sur les flancs est celle qui présente le moins de difficultés, » a dit Clausewitz.. Cette observation inspira le plan de bataille de l’état-major prussien. L’armée allemande n’aborderait le front formidable de notre armée que lorsque son aile gauche aurait débordé notre aile droite par une manœuvre enveloppante ; jusque-là, l’artillerie seule entretiendrait le combat devant notre front. La IIe armée ferait une conversion à droite par échelons et établirait son front parallèlement à l’armée française. Le IXe corps s’avancerait par Vernéville sur Amanvillers. La Garde accélérerait son mouvement sur Vernéville, prendrait ensuite par Habonville, aborderait notre droite par Amanvillers conjointement avec le IXe corps. Le XIIe corps resterait provisoirement immobile à Jarny, puis marcherait sur Sainte-Marie. Le IXe corps différerait son attaque jusqu’à ce que la Garde fût en mesure de s’engager.

La Ire armée ne bougerait pas tant que ne se serait pas dessiné le mouvement de la IIe armée ; alors elle la soutiendrait et attaquerait de front et de flanc par Gravelotte et le bois des Génivaux. Les deux armées agissant de concert prononceraient l’enveloppement de l’armée française. Le IIIe et le Xe corps se tiendraient en réserve derrière le IXe. Le IIe corps, de Pont-à-Mousson, viendrait à Buxières servir de réserve à la Ire armée. La cavalerie serait tenue sur les derrières. Ainsi disposée, l’armée allemande tournerait le dos à ses communications et ne serait plus reliée à sa base d’opérations que par Ars et Novéant. Cette disposition supposait une marche de flanc le long d’une hauteur occupée par l’ennemi dont l’offensive eût pu devenir très périlleuse.

Napoléon a dit : « Rien n’est plus téméraire et plus contraire