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superficialités ou les inexactitudes en simplifiant notre représentation du passé au delà du point où nous réduisent et les lois de l’esprit et les hasards qui présidèrent à la conservation des documens. Comment juger une histoire de la métaphysique que l’on couperait de l’histoire de la physique ; une histoire du point de vue relativiste, qui ne s’appuierait pas sur l’histoire de la théorie astronomique ; une histoire de la pensée humaine où l’on sauterait à pieds joints de Plotin à Descartes ? Les découvertes dont on a ici donné une rapide esquisse n’indiquent-elles pas que de telles simplifications peuvent s’appeler d’involontaires, mais très certaines falsifications !

Cette œuvre enseigne encore combien est erronée la tradition qui confond en un bloc l’âge des désordres seigneuriaux avec l’époque organisatrice de la féodalité, et oppose « le Moyen Age » à « la Renaissance. » Sans doute, ses tenans n’osaient plus montrer dans l’art gothique un art barbare, ni dans la civilisation des xiie-xiiie siècles un pur régime d’arbitraire et de fanatisme. Mais du moins pouvaient-ils, jusqu’aux travaux de M. Duhem, fonder l’opposition de ces deux époques sur leur diverse attitude à l’égard de la méthode expérimentale, et caractériser sommairement « la Renaissance » par l’essor de la science et l’ébranlement de la foi. On voit aujourd’hui ce qu’il en faut penser : c’est en plein « Moyen Age » qu’est née la Science.

Albert Dufourcq.