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actuellement pour être distribués 794 coups de douze, 3 840 de quatre, et 4 350 de mitrailleuses. L’arsenal, après cet envoi, n’a plus aucune ressource pour l’armée. On ne peut compter, pour ce réapprovisionnement, que sur les ressources venant de Paris, demandées au ministère, et qui ne peuvent arriver que par Thionville. »

Cette note confirmait les sinistres avertissemens de la veille et elle inspira à Bazaine de nouvelles alarmes qu’on retrouve dans les deux dépêches qu’il envoya de son côté au ministre et à l’Empereur : « 17 août — 4 h. 30. Hier soir j’ai eu l’honneur d’écrire à Votre Majesté pour l’informer de la bataille soutenue de neuf heures du matin à neuf heures du soir contre l’armée prussienne qui nous attaquait dans nos positions de Doncourt à Vionville. L’ennemi a été repoussé et nous avons passé la nuit sur les positions conquises. La grande consommation qui a été faite de munitions d’artillerie et d’infanterie et la seule journée de vivres qui restait aux hommes m’ont obligé à me rapprocher de Metz pour réapprovisionner le plus vite possible nos parcs et nos convois. — J’ai établi l’armée sur les positions comprises entre Saint-Privat et Rozérieulles. Je pense pouvoir me mettre en marche après-demain en prenant une direction plus au Nord, de façon à pouvoir déboucher sur la gauche de la position d’Haudimont, dans le cas où l’ennemi l’occuperait en force pour nous barrer la route de Verdun, et pour éviter les combats inutiles qui retarderaient notre marche. Le chemin de fer des Ardennes est toujours libre jusqu’à Metz, ce qui indique que l’ennemi a pour objectif Châlons et Paris. On parle toujours de la jonction des armées des deux princes. Nous avions hier devant nous le prince Frédéric-Charles et le général Steinmetz. »

L’Empereur, ne trouvant pas ces dépêches suffisamment explicites, répond : « Camp de Châlons — 17 août, 6 h. 5. — Dites-moi la vérité sur votre situation, afin de régler ma conduite ici. Répondez-moi en chiffres. »

La réponse de Bazaine n’est pas une dépêche. Il envoie à Châlons le colonel Magnan. Il lui remet un rapport, qui est un ramassis de fausses nouvelles et de renseignemens inexacts : L’armée, y est-il dit, est peu riche en vivres, et le général Soleille rend compte qu’elle est peu approvisionnée en munitions et qu’il ne peut donner que 800 000 cartouches, ce qui est l’affaire d’une journée ; il y a également un petit nombre de