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du 16 août, ne lui permet pas de trotter ou de galoper. Parvenu au mont Saint-Quentin, il ne recueille que des impressions rassurantes. Il fouille de sa lorgnette tous les points de l’horizon, il n’aperçoit rien de menaçant. Lapasset contient l’attaque sur Sainte-Ruffine, et là où Lapasset se trouve avec ses braves, aucun danger ne peut surgir et au pis aller, s’il doit se retirer, il sera à l’abri sous la protection du Mont Saint-Quentin, Bazaine se convainc que l’attaque lointaine de Manteuffel ne peut rien contre lui. On avait parlé de tirailleurs ennemis se glissant à l’abri de l’angle mort de la citadelle et menaçant la route de Rozérieulles sur Moulin-lès-Metz. On n’en découvre aucun.

Les rapports de ses chefs d’armée qui l’atteignent confirment ce qu’il voit. Frossard juge que les Prussiens ne font devant lui qu’une démonstration, en dessinant vers sa gauche un mouvement tournant, mais la brigade Lapasset étant à Sainte-Ruffine, il compte sur elle. Le Bœuf vient de repousser une attaque sur son front et s’attend à être assailli de nouveau vers cinq heures ; il serait heureux de recevoir des renforts (la division de grenadiers), mais il ne les demande pas formellement et croit pouvoir tenir avec ses propres moyens[1]. En effet, un billet de lui dit seulement : « Attaqué sur toute la ligne par l’artillerie qui est nombreuse. Nous tenons bien, je suis tranquille. » Bazaine reçoit du chef du poste télégraphique du clocher de la cathédrale une dépêche disant que la canonnade paraît se calmer ou du moins s’éloigner sur les plateaux. Ladmirault demande de l’infanterie, mais afin de poursuivre un succès qu’il ne peut mener à bout par ses propres moyens. Tout cela contente Bazaine et il télégraphie à l’Empereur : « En ce moment quatre heures, une attaque conduite par le roi de Prusse en personne, avec des forces considérables, est dirigée sur tout le front de notre ligne. Les troupes tiennent bon jusqu’à présent, mais des batteries ont été obligées de cesser le feu. »

Néanmoins Bazaine renforce Le Bœuf du 3e voltigeurs de Deligny ; plus tard il renforcera Frossard d’un régiment de zouaves. Mais il renvoie la division de cavalerie Forton (5 heures) rejoindre à Metz la division Valabrègue qui y était déjà et il inutilise ainsi toute sa cavalerie. Il est rejoint par le colonel Lewal qui lui remet le rapport sur les reconnaissances faites en

  1. Lieutenant-colonel Picard, La guerre en Lorraine, p. 281.