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et le prince de Wurtemberg jugèrent que Sainte-Marie, occupée par nous, devait être enlevée tout d’abord et sans attendre que le mouvement tournant des Saxons fut achevé. La fraction de l’artillerie saxonne, déjà présente, remplacerait les pièces de la Garde détachées au secours du IXe corps, et l’attaque sur Sainte-Marie commença.


II

A la droite française aucun indice ne marquait dans la matinée l’approche de l’ennemi ; les reconnaissances envoyées par le général Du Barail n’avaient rien aperçu, mais, à leur défaut, l’aumônier de la division, qui avait rejoint après être resté en arrière, sur le champ de bataille du 16 août, auprès de quelques blessés, annonça que les Prussiens se rapprochaient en masse et allaient tenter une action offensive. Canrobert n’en voulut rien croire : il supposait que la journée se passerait tranquillement ; mais la canonnade lui prouva que l’aumônier avait donné un renseignement exact. Il déploie aussitôt ses troupes sur leurs positions de combat ; il étend sa ligne de défense jusqu’à Roncourt, Sainte-Marie-aux-Chênes, pour opérer un rabattement de l’aile droite s’il devenait nécessaire. Au moment de s’engager, craignant que ses munitions ne lui fissent défaut, il chargea le lieutenant de Bellegarde (11 h. 1/2) d’aller dire à Bazaine qu’il n’avait pas pu reconstituer ses approvisionnemens le 17, qu’il avait dépensé beaucoup de gargousses le 16, et n’avait pu se ravitailler en cartouches ; qu’on lui en envoyât, parce qu’il n’avait que des caissons à moitié ou au tiers pleins. Il reçut à ce moment de Bazaine un avertissement qui le prévenait du choc qui le menaçait et contre lequel il se débattait déjà : « Metz, 18 août, 10 heures du matin. — M. le maréchal Le Bœuf m’informe que des forces ennemies qui paraissent considérables, semblent marcher vers lui ; mais, à l’instant où je vous écris, il m’envoie l’extrait ci-joint du rapport de ses reconnaissances. Quoi qu’il en soit, installez-vous le plus solidement possible sur vos positions ; reliez-vous avec la droite du 4e corps ; que les troupes soient campées sur deux lignes et sur un front le plus restreint possible. Si par hasard l’ennemi, se prolongeant sur notre front, semblait vouloir attaquer sérieusement Saint-Privat-la-Montagne, prenez toutes les