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tirer de conclusion définitive ; il semble que, par ce processus, la mort calorifique de l’Univers sera énormément retardée, mais on peut croire qu’elle ne sera que retardée. »

C’est d’une façon tout à fait différente qu’un éminent astronome allemand, M. Seeliger, directeur de l’observatoire de Munich, a récemment abordé le problème.

Nous avons vu par l’exemple du phénomène invoqué par Arrhenius, sans même parler des démons de Maxwell, qui sont seulement une image hardie, qu’on a découvert ou imaginé des phénomènes qui sont en contradiction avec le principe de Carnot, la chaleur pouvant passer d’un corps froid à un corps chaud sans travail compensateur. S’il y a des infractions à ce principe, pourquoi seraient-elles très limitées dans le temps et dans l’espace, et ne peuvent-elles pas avoir, dans l’un et l’autre, des manifestations très importantes ? Ces objections ont paru si fortes qu’on a été conduit à se faire une conception nouvelle du principe de Carnot et à ne plus le considérer que comme un théorème du calcul des probabilités, et ce principe est devenu à peu près ceci : les phénomènes qui se produisent habituellement dans la nature ont lieu dans un sens qui correspond à une perte d’énergie utile.

Cette conception statistique, — si on veut me permettre cette expression, — laisse forcément subsister la possibilité de processus naturels ne satisfaisant pas au principe de Carnot. La question de savoir si le principe de Carnot est une loi naturelle valable sans exception est donc résolue définitivement par la négative, si on la considère comme un théorème du calcul des probabilités.

Autre chose : les conclusions du calcul des probabilités ne sont applicables qu’à des phénomènes que l’on doit regarder comme fortuits, c’est-à-dire se produisant sans aucun règle, sans aucun ordre apparent. Or si le principe de Carnot est d’une grande valeur dans beaucoup de parties de la physique, qui oserait soutenir que les mouvemens observables dans l’ensemble de l’Univers sont désordonnés, et que l’évolution de celui-ci est dirigée vers la production d’une irrégularité grandissante ? On pourrait aussi bien et même mieux soutenir le contraire et alors la validité du principe de Carnot deviendra de plus en plus faible avec le temps.

Autre chose encore, — et cette remarque s’applique à la fois aux conséquences cosmiques opposées que l’on voudrait tirer du premier