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nius, l’Évolution des mondes, de la dernière œuvre scientifique d’Henri Poincaré sur les Hypothèses cosmogoniques et de bien d’autres travaux astronomiques actuels.

Tous les philosophes et tous les savans sont à peu près d’accord sur la pérennité de ces substances que nous appelons matière ou éther. Ex nihilo nihil est pour eux un axiome. Les théogonies mêmes sont d’accord là-dessus, et la Genèse par exemple nous enseigne que le Créateur a tiré le monde non du néant, mais du chaos. On peut concevoir le chaos comme un état des choses où celles-ci n’étaient pas mobiles, pas organisées, pas différenciées (car nous verrons que l’organisation résulte d’une différenciation), où il n’y avait pas de forces, pas d’énergie agissantes.

Et ceci nous conduit immédiatement à considérer les deux grands principes de thermodynamique qui gouvernent toutes les manifestations de l’énergie dans le monde et nous amèneront au nœud même de la question que nous nous sommes posée. Le premier principe, celui de la conservation de l’énergie, est dû à deux grands physiciens allemands, Robert Mayer et Helmholtz. Le second, celui de la dégradation de l’énergie, a été découvert par un génie français longtemps méconnu, l’ingénieur Sadi Carnot, et mis au point par Clausius.

Tout le monde sait aujourd’hui ce que l’on entend par énergie, et que c’est, si j’ose dire, la capacité qu’ont les objets de fournir du travail. Les principales formes sous lesquelles nous la connaissons sont l’énergie due au mouvement (celle d’un projectile est proportionnelle à sa masse et au carré de sa vitesse), l’énergie calorifique (c’est elle qui vaporise l’eau des machines à vapeur et fait marcher celles-ci), l’énergie électrique (rassemblée par exemple dans une batterie d’accumulateurs elle peut être transformée en énergies lumineuse dans une lampe, calorifique dans un radiateur, mécanique dans un ventilateur, etc.) ; enfin et pour nous borner, citons l’énergie chimique (c’est elle qui produit de la chaleur dans un bec de gaz ou du mouvement dans le cas d’un explosif).

Ces quelques exemples nous montrent qu’il y a une certaine réversibilité dans les diverses formes de l’énergie, et qu’on peut indifféremment, et par des moyens appropriés, transformer l’une quelconque en l’une quelconque des autres.

Or le principe de la conservation de l’énergie exprime ce fait expérimental que lorsque deux formes d’énergie se transforment l’une dans