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en avant, avait essayé une attaque brusque contre Toul. Son artillerie de campagne n’était point parvenue à démolir la porte de la ville et à en forcer l’entrée ; l’infanterie avait été arrêtée par les bastions en maçonnerie et les larges fossés remplis d’eau. La IIIe armée (Prince royal) dont le quartier général était à Nancy, composée des vainqueurs de Wœrth et accrue du VIe corps, s’avançait vers la Meuse en quête de Failly et de Mac Mahon. Des dépêches parvenues dans la journée du 16 août et dans la nuit suivante, soit au quartier général de Frédéric-Charles, soit à celui du Roi, avaient enfin montré la réalité aux chefs de l’armée. Le soir du 16 août, ils voient clairon à peu près et se retournent vivement.

Le but principal de Moltke avait été, jusque-là, de nous devancer vers la Meuse, de nous empêcher d’atteindre Châlons et en même temps de nous séparer de Metz de manière à nous isoler de tous les côtés et à nous rejeter vers le Nord. Dès qu’il se fut rendu compte de notre présence sur la ligne Gravelotte — Mars-la-Tour, sans renoncer à son but, il modifia sa tactique : ce ne seront plus le IIIe et le XIIe corps seulement, ce seront les cinq corps entiers de la Ire et de la IIe armée qui seront chargés de battre l’armée de Bazaine, dont Alvensleben a constaté la présence sur le plateau de Rezonville ; ces sept corps se concentreront sur la route de Gravelotte à Mars-la-Tour. L’ordre de concentration, limité par Moltke, élargi par l’initiative clairvoyante du prince Frédéric-Charles, vole de tous les côtés. Il atteint rapidement le IXe corps, dont quelques fractions ont combattu la veille, et sont groupées à Gorze, où est établi le quartier général du Prince. Il atteint très vite la XVe division du VIIIe corps, arrivée la veille dans la soirée, aux environs de Lorry. Il n’est pas long non plus à parvenir au VIIe, établi à Silligny et Pommérieux. Il n’arrive que bien plus tard à la Garde, à Bernécourt, à 34 kilomètres du champ de bataille, au XIIe à Pont-à-Mousson, au IIe à Buchy (40 kilomètres), au IVe aux Séseraies (50 kilomètres).

Plusieurs chefs de ces corps, notamment celui de la Garde, avaient, au bruit du canon, prévu les ordres et s’étaient mis en mesure de les exécuter. Le prince de Wurtemberg, leur chef, montra la manière dont il faut pratiquer la règle, si peu débrouillée, de marcher au canon. Un officier du XIIe accourt, tout effaré, lui annoncer que le IIIe et le Xe ont été battus, ont