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menacés[1]. Par eux, la défense nationale est compromise.

Dès avant les mutineries de mai, on pouvait chiffrer les résultats de cette propagande. Le nombre des déserteurs et des insoumis accuse en effet la progression suivante :

Déserteurs.Insoumis.
1898..... 1901 4 078
1899..... 1990 3 950
1900..... 1873 5157
1901..... 2318 3774
1902..... 2223 3768
1903..... 2194 4973
1904..... 2316 4737
1905..... 2074 7807
1906..... 3169 10 082
1907..... 3437 10 030
1908..... 3129 9378
1909..... 2022 10 049
1910..... 2020 9029
1911..... 2548 9786

Aux 31 décembre 1909, 1910, 1911, le ministre de la Guerre faisait rechercher comme déserteurs ou insoumis :

63 337
70 038
76 723

Cette progression coïncide avec le progrès de la mainmise anarchiste sur les organisations ouvrières. Il a été en outre établi, au cours de la crise franco-allemande de 1911, que des anarchistes syndicalistes avaient su se glisser, dans les régimens, aux postes les plus propres à saboter la mobilisation. M. Messimy, ancien ministre de la Guerre, ayant exposé ces faits, le 30 novembre 1912, M. Poincaré, président du Conseil, lui a répondu : « Le gouvernement ne vous dément pas. » Le péril actuel n’est donc pas contestable. Le péril futur est impossible à mesurer.

Contre ce péril les mesures prises jusqu’ici ont été peu efficaces : on doit avouer d’ailleurs qu’elles ont été médiocres. La cause en est sans doute qu’on n’a jamais considéré le mal dans son ensemble, qu’on s’est attaqué toujours à des manifes-

  1. Pour ne pas sortir du cadre de cette étude, nous avons dû laisser de côté les innombrables appels au sabotage des services publics et aux violences contre les personnes en temps de paix qui, notamment pendant la grève des cheminots de 1910, méritent un exposé spécial.