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rien de changé dans les proportions. Quant à l’alliance, la Bulgarie y est très attachée, mais elle ne saurait y sacrifier des pays habités par des Bulgares ; elle estime d’ailleurs que la Serbie reconnaîtra que son intérêt l’engage à chercher un appui du côté de ses voisins de l’Est ; et, l’intérêt, c’est un lien plus fort même que les affinités de race.

En Macédoine, les Grecs ont occupé, durant la guerre, de vastes territoires autour de Salonique ; ils sont en contact, dans la région de Monastir, avec les Serbes ; ils ont étendu leurs avant-postes jusqu’aux alentours de Sérès et ils demandent aujourd’hui à rester propriétaires définitifs des territoires qu’ils détiennent. Le maximum de leurs revendications — ce maximum que l’on ne formule que pour faire une première concession en l’abandonnant — comprend Kavala, Drama, Demir-Hissar, Doïran et Monastir ; mais leur première ligne de défense sérieuse laisserait en dehors de la zone grecque Kavala, Drama, Doïran et Monastir ; elle engloberait Sérès. Les Grecs reconnaissent que la région qu’ils demandent n’est pas entièrement peuplée de Grecs. Ils y comptent 1 012 000 Grecs, contre 383 000 Musulmans et 94 000 Bulgares. Les meilleures cartes ethnographiques, — celle, par exemple, du professeur Cvijic, de l’Université de Belgrade[1], — indiquent comme entièrement grecque la péninsule Chalcidique ; la plaine entre Drama, Sérès et la mer est peuplée de Grecs et de Turcs ; au Nord de Sérès la campagne est bulgare ; la ville même de Sérès est grecque, turque et bulgare. De l’autre côté du golfe de Salonique, le bassin de la Vistritza, à l’exception de la région des sources (Kastoria), est entièrement grec ; à l’intérieur du grand angle que forme cette rivière et jusqu’au lac d’Ostrovo, on trouve des Turcs. Au Nord de Salonique, les villages bulgares viennent jusqu’aux portes de la grande ville. La frontière minima que revendiquent actuellement les Grecs engloberait donc des pays bulgares ; les Grecs ne le contestent pas, mais ils allèguent qu’en Thrace, à Andrinople, sur les côtes de la Mer-Noire et de la mer Egée, les Bulgares vont annexer des cantons où vivent un bien plus grand nombre d’habitans grecs, plus de 300 000, qui, par leur situation géographique, ne peuvent pas espérer entrer dans la grande Grèce et se trouveront incorporés dans le royaume

  1. Petermanns Mitteilungen de mars 1913.