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désigne, en Son nom, pour mon successeur dans l’épiscopat…

Sur quoi le peuple s’est écrié vingt-six fois :

« — Nous te rendons grâces de ton choix !

Et le peuple ayant fait silence, Augustin, évêque, a dit :

« — Je vous remercie de votre charité et de votre bienveillance, ou plutôt j’en rends grâces à Dieu. Ainsi donc, mes frères, qu’on s’en remette désormais à Héraclius pour toutes les choses qu’on me soumettait auparavant. Toutes les fois qu’il aura besoin d’un conseil, ni mes soins, ni mon secours ne lui feront défaut… De cette façon, sans qu’il vous manque rien, je pourrai consacrer le reste de vie, qu’il plaira à Dieu de me laisser encore, non à la paresse et au repos, mais à l’étude des Saintes Écritures. Ce travail sera utile à Héraclius et, par là, à vous-mêmes. Que personne ne porte donc envie à mon loisir, car ce loisir sera très occupé…

« Il ne me reste plus qu’à vous prier, du moins ceux qui le pourront, de signer ces actes. Votre assentiment m’est indispensable : veuillez me le témoigner par vos acclamations.

À ces mots, le peuple s’est écrié :

« — Qu’il en soit ainsi ! Qu’il en soit ainsi !

…………………..

L’assemblée ayant fait silence, Augustin, évêque, termina, en disant :

« — C’est bien ! Maintenant, rendons nos devoirs à Dieu. Tandis que nous lui offrirons le Sacrifice, et, pendant cette heure de supplication, je recommande à Votre Charité de laisser de côté toute affaire et tous soins personnels et de prier le Seigneur pour cette église, pour moi et pour le prêtre Héraclius. »


La sécheresse et la phraséologie officielle de ce document ne parviennent point à effacer le relief et la couleur de cette scène populaire. À travers les pieuses formules d’acclamation, on entrevoit le caractère difficile des ouailles d’Augustin. Ce troupeau tant chéri et tant morigéné par lui n’était pas plus commode à conduire maintenant qu’au début de son épiscopat. Certes, ce n’était point une sinécure que de diriger et d’administrer le diocèse d’Hippone ! L’évêque est littéralement le serviteur des fidèles. Non seulement il faut qu’il les nourrisse et qu’il les habille, qu’il s’occupe de leurs affaires, de leurs querelles et de leurs procès, mais qu’il leur appartienne corps et âme. Ils surveillent