Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 15.djvu/746

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


VI

Ladmirault n’avait pas répondu à l’attente de Bazaine. Voigts-Rhetz ne fit pas défaut à celle d’AIvensleben. Il s’était hâté d’accourir à l’aide de ses camarades en danger. Son corps, échelonné, le 15 août, sur la route de Pont-à-Mousson à Verdun, avait sa division de tête et son quartier général à Thiaucourt. Il avait apporté l’ordre du prince Frédéric-Charles de pousser le plus loin possible la poursuite des Français dans la direction de Verdun. Voigts-Rhetz, très fatigué, s’en remettait à son chef d’état-major Caprivi, homme d’une grande vigueur intellectuelle et physique, qui fut chancelier de l’Empire après le renvoi de Bismarck. Selon Caprivi, le prince Frédéric-Charles se trompait : les Français n’étaient pas en retraite, et il y aurait de grands inconvéniens à s’avancer vers le point où ils ne se trouvaient pas et à s’éloigner de celui où se livrerait réellement la bataille. Il ne désobéit pas ouvertement ; il respecta la lettre, mais prit les dispositions telles qu’il serait en mesure de marcher vers Rezonville, Mars-la-Tour, et de secourir le IIIe corps. Il n’interrompait pas la marche sur Saint-Hilaire, que Schwarzkoppen opérait avec la moitié de sa division (XIXe), et la brigade des dragons de la Garde, mais il prescrivit aussi à la division Kraatz (XXe) et à l’artillerie de corps de se rendre à Thiaucourt et de se tenir prêtes à intervenir avec le gros de leurs forces à Mars-la-Tour et Vionville. Lui-même quitta Thiaucourt à quatre heures du matin et se rendit sur le terrain probable de l’action. De là, il suit les péripéties de la lutte du IIIe corps, et, se rendant compte de l’urgence de le soutenir, il envoie aux divers élémens du Xe l’ordre de venir à la bataille. Avant tout ordre, la brigade Brandebourg (Ire division de la cavalerie de la Garde) marchait déjà sur Mars-la-Tour, avec quatre escadrons et une batterie à cheval. Deux batteries légères de la XXe division, venues de Thiaucourt, puis six autres, se placent sur sa droite ; la XXe division d’infanterie se dirige vers les bois de Tronville ; trois bataillons balaient les bois, où il n’y avait plus personne depuis que Grenier en avait été retiré. Ils donnent au colonel Lehmann exténué la faculté d’aller se reposer à Tronville (3 h. l/2). Un autre secours bien plus important advient à Alvensleben : celui du généralissime lui-même.