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derrière le centre de la position qu’allait réoccuper la division Grenier.

Même en admettant que la position de résistance du 4e corps d’armée dût être constituée par le plateau du Poirier, il fallait grouper les divisions Legrand et Du Barail sur le plateau d’Yron, d’où elles pouvaient déborder par l’Ouest une offensive ennemie dirigée de Tronville, ou bien prendre en flanc, du Nord au Sud, l’attaque qui marcherait des abords de Ville-sur-Yron sur la position de défense[1]. « Cette retraite, si peu justifiée, cause une impression d’étonnement à toutes les troupes. Certaines ne peuvent se décider à l’effectuer. Il faut deux fois répéter l’ordre[2]. » Alvensleben respire : « Nous reprenons l’attitude défensive. Pour les Allemands, c’est le salut ; pour l’armée du Rhin, c’est le renoncement à la victoire alors presque saisie. Entre la circonspection excessive de Ladmirault et l’audace raisonnée d’Alvensleben le contraste est frappant et douloureux[3]. » « A deux heures du soir, l’aile droite française pouvait tout oser. Si donc l’aile droite française est restée inerte, il faut s’en prendre à son commandement que l’on peut qualifier d’anémique[4]. »

Ladmirault fut-il paralysé par l’inaction du corps de Le Bœuf ? Il ne tenait qu’à lui d’en avoir l’appui. Le Bœuf était si impatient d’accourir qu’il avait voulu devancer le mouvement sans l’attendre, au risque de le faire échouer, et que Bazaine avait dû le retenir. Si Ladmirault lui eût fait signe, Le Bœuf se serait mû immédiatement avec les 24 bataillons et les 10 batteries qui lui restaient. Il aurait marché, si Ladmirault avait avancé. Il n’a pas marché, lui le pivot, parce que Ladmirault, qui était l’aile marchante, n’a pas donné le signal de la marche.

Ayant mis ainsi ses troupes d’infanterie sur la défensive, Ladmirault se rendit à la ferme Gréyère, d’où il put observer le point noir qui l’avait détourné de son attaque : il n’est plus qu’un spectateur qui observe et attend. Il aperçoit 5 à 6 000 cavaliers français et allemands, hussards, dragons, lanciers, cuirassiers, tantôt plus nombreux sur un point, tantôt inférieurs

  1. Général Donnal.
  2. Lehautcourt, Histoire de la Guerre de 1870-1871, t. V, p. 249.
  3. Colonel Picard, 1870, La guerre en Lorraine, t. II, p. 90.
  4. Bonnal, p. 439.