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des particules de carbone, M. Leduc a pu imiter d’une manière remarquable un grand nombre des phénomènes qui étaient regardés naguère comme exclusivement caractéristiques de la matière vivante : la karyokinèse et la multiplication des cellules nucléaires artificielles qu’il réalise ainsi s’opèrent d’une manière qui rappelle à s’y méprendre ce qui se passe pour les cellules vitales. Voici, pour ne prendre qu’un exemple, comme M. Leduc réalise artificiellement le phénomène du phototropisme, qui avait été longtemps considéré comme essentiellement vital : si, dans une solution saline appropriée dont la moitié est éclairée et l’autre plongée dans l’obscurité, on verse une goutte d’eau teintée d’encre de Chine, les particules de charbon abandonnent la portion illuminée et cherchent refuge dans la partie sombre.

Certes, il est interdit actuellement de voir dans ces expériences autre chose que des analogies ; mais, même sous cette réserve, elles n’en sont pas moins puissamment suggestives. Elles nous aideront à comprendre l’audacieuse théorie que M. Loeb a donnée de l’origine de nos instincts et de nos désirs.

C’est d’ailleurs par une voie toute différente de celle où nous venons de jeter un regard que M. Loeb et ses émules ont abordé la question de la génération des êtres vivans, et tenté l’assaut d’une des principales forteresses vitalistes : nous voulons parler du rôle mystérieux de l’élément mâle dans la fécondation.

On sait que tout animal dérive d’un œuf et que, chez la plupart des animaux, cet œuf ne peut se développer que lorsqu’un spermatozoïde y a pénétré. La façon dont le spermatozoïde provoque le développement de l’œuf en un nouvel individu paraissait, il y a quelques années encore, un mystère complet. Les expériences de M. Loeb, que nous allons rapidement résumer, montrent que la fécondation semble pouvoir se ramener entièrement à un processus physico-chimique.

On sait que lorsqu’un spermatozoïde pénètre dans l’œuf, celui-ci commence à se développer ; son noyau et la cellule se divisent en deux, puis chaque noyau et chaque cellule subissent une nouvelle bipartition, et ainsi de suite. La façon dont les cellules formées se juxtaposent ensuite, se nourrissent et se différencient peu à peu pour constituer avec son organisation la larve embryonnaire, tout cela n’importe pas pour l’objet de cet exposé qui est uniquement le mécanisme de la fécondation.

Déjà, il y a une douzaine d’années, M. Loeb avait réussi à faire développer en larves des œufs vierges d’Oursins en les traitant par de l’eau de mer à laquelle on avait ajouté du sel. Mais le mécanisme de