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tout ce monde, cette grande estrade pour la Cour et les ambassadrices et ces buffets avec leurs pyramides de fruits, de bonbons, de fleurs, tout cela réuni à une marche pompeuse, exécutée avec tout le talent dont Tolbeque est capable, nous arracha à tous des cris d’admiration. Le Duc d’Orléans lui-même, malgré toute sa mauvaise humeur, en fut stupéfait ; néanmoins, il m’assura de nouveau qu’il était trop fatigué pour rester et que surtout, il ne se sentait pas en train d’être aimable.

— Moi, au contraire, monseigneur, lui dis-je, je suis fort disposé à m’amuser, d’autant plus que je n’ai qu’une seule danse de corvée. Monseigneur n’est pas dans le même cas ; il n’en aura pas mal aujourd’hui.

— Oui, oui, mon cher comte, mais encore ne suis-je pas obligé de me sacrifier par trop.

— Un prince, dis-je...

— Un prince, interrompit le Duc, n’est pourtant pas non plus un cheval de charrette qui doit aller toujours et traîner tous les fardeaux après lui. Pour vous parler franchement, je m’en vais surtout pour ne pas être oblige de danser avec la comtesse de B***.

— Moi, repris-je, qui n’ai pas le bonheur d’être un grand prince et d’en avoir les bénéfices, je ne puis me dispenser de traîner cette charrette-là.

Après le bal, il y a eu un superbe souper dans la galerie de Diane, après lequel nous prîmes tous congé de la Reine, devant partir le lendemain à dix heures du matin.


COMTE RODOLPHE APPONYI.